“Les morts aussi ont bien besoin de nos prières.”
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Pour nous mêmes, nos amis, nos ennemis (à grand peine) : nous prions la plupart du temps pour les vivants. Pourtant, les morts aussi ont bien besoin de nos prières, en particulier ceux qui sont au purgatoire. Or, un sanctuaire leur est dédié : Notre-Dame de Montligeon.
Une œuvre sociale pour les vivants et les morts
On ne le sait plus guère de nos jours, mais s’il y a “beaucoup d’appelés et peu d’élus”, la plupart même parmi les élus ne verront pas le royaume céleste avant d’être passés au purgatoire. Dans cette sorte d’antichambre, nous recevons la peine pour les péchés commis afin d’en être purifiés. Certes, celle-ci n’est pas éternelle comme la damnation – le purgatoire est donc en quelque sorte infiniment meilleur – mais il est dit par l’Église qu’on y souffre beaucoup tout de même.
Or c’est un simple curé, à la fin du XIXe siècle, l’abbé Buguet, qui ayant été nommé en la chapelle Montligeon, décida d’y mener deux grandes œuvres. La première est de bâtir un sanctuaire pour le repos des âmes du purgatoire afin de soulager leur souffrance en attendant la délivrance. La seconde fut d’offrir du travail et des revenus décents aux habitants des environs, et il ouvre pour cela une imprimerie. Une œuvre sociale donc, au bénéfice de ceux qui sont en peine, autant vivants que trépassés, tant matérielle que spirituelle, en un mot une œuvre chrétienne.
Faisant partout et en personne des quêtes pour financer son projet, il trouve finalement assez de fonds pour bâtir la grande église néogothique dans ce petit village du Perche.
La digne amphore d’où s’élève le parfum des prières
C’est une étonnante vision qu’offre cette petite cathédrale surgissant des cimes de la forêt du Perche comme le sommet d’une montagne au milieu des nuages. En s’approchant, le voyageur finit par apercevoir les maisons du bourg aux pieds de la basilique, tandis que celle-ci, du haut de sa colline, tend majestueusement ses deux clochers vers le ciel.
Il faut remonter la grande esplanade centrale pour parvenir au parvis. Au dessus du portique, le Christ attend à l’entrée d’une grotte pour saluer ceux qui en sortent. Nous pouvons alors pénétrer dans la nef, assez grande pour recevoir en même temps tous les habitants de la paroisse. Une rosace l’illumine de mille diamants.
L’abbé Buguet a voulu en faire la digne amphore d’où s’élèverait le parfum des prières. Au dessus de l’autel ciselé, la Sainte Vierge porte d’une main le Christ enfant et tend la droite aux deux affligés aux poignets ferrés qui la supplient, les invitant sans doute à venir le toucher. Lui même tend à l’un deux une couronne de fleur, accédant volontiers à la plaidoirie de sa mère, comme “en ce temps là”, aux noces de Cana.
Tout, ici, nous enseigne que nous entrons dans un lieu ou nous pourrons faire le bien de quelqu’un. Beaucoup de sanctuaires sont des lieux de pénitence, comme Lourdes où nous allons malades pour revenir guéris. Ici nous venons en libérateurs, non pour être guéris mais pour apporter des remèdes, non pour nous accuser mais pour témoigner à décharge.
Y aller seul ou accompagné
Nul besoin d’y aller seul. Des pèlerinages y sont fréquemment organisés, ainsi que de multiples colloques, rencontres etc. Le sanctuaire peut en effet héberger près de deux cents personnes. Pendant quarante ans, jusqu’en 2013, un pèlerinage venait même du Portugal, chaque Pentecôte pour célébrer Notre-Dame de Fatima. Aucune raison, donc, de ne pas y diriger ses pas.
Il est bien difficile aujourd’hui de garder les vertus chrétiennes et de faire son salut tout en ayant des amis dans le monde. À Notre-Dame de Montligeon, l’Église nous donne une bonne occasion de nous faire des amis dans le ciel, pourquoi ne pas la saisir ? Pourquoi ne pas saisir cette couronne tendue ?