Avec la technique dite du CRISPR-Cas9, il devient techniquement possible de modifier l’ADN d’un être humain.
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“Quand on a une très forte puissance, il faut avoir beaucoup d’humilité”, avertit Tugdual Derville, délégué général d’Alliance Vita. Or les possibilités ouvertes par le CRISPR-Cas9 ont de quoi faire tourner les têtes !
CRISPR-Cas9, une découverte fantastique
Ressusciter les mammouths en modifiant génétiquement des éléphants, éradiquer le paludisme ou corriger le gène responsable d’une maladie héréditaire… Toutes ces propositions relèvent de moins en moins de la science-fiction. Pour un coût modique, un scientifique peut désormais couper un brin d’ADN, et “reprogrammer” une cellule. Ainsi un laboratoire américain a tenté, à l’aide de cette méthode, de rendre un moustique résistant au paludisme, ce qui permettrait théoriquement d’éradiquer cette maladie. En relâchant les insectes modifiés génétiquement, ils contamineraient progressivement leur espèce, jusqu’à ce que tous les moustiques soient immunisé au paludisme, et que la maladie disparaisse, faute de vecteur. La méthode CRISPR-Cas9 est encore récente et ses effets sont encore mal connus. Il est par exemple possible qu’elle ne touche pas que le brin d’ADN visé. Or les manipulations génétiques sont héréditaires, et risquent de se répandre avant même que tous leurs effets soient appréhendés. Elle demande donc un contrôle à la hauteur des possibilités thérapeutiques qu’elle ouvre.
Test sur l’embryon humain
D’autres laboratoires vont encore plus loin. En Grande-Bretagne, une équipe de l’Institut Francis-Crick, à Londres, a reçu le 1er février de l’Autorité pour l’embryologie et la fertilisation humaine britannique (HFEA) l’autorisation de procéder à des manipulations sur des embryons humains. Au 14e jour de développement de l’embryon génétiquement modifié, elle est tenue de les détruire. En Chine, l’équipe de Junjiu Huang (Université Sun-Yat-sen, Canton) a tenté de corriger, dans des embryons humains, le gêne responsable d’une maladie du sang.
Le transhumanisme en embuscade
Le docteur Xavier Mirabel, ancien président d’Alliance Vita et actuellement conseiller médical de l’association, avertissait lors d’une conférence de presse le 24 mai 2016 : “Le désir de puissance trouve toujours des personnes, des lieux pour s’exprimer. J’entends des partisans du transhumanisme qui s’enthousiasment devant les nouvelles possibilités offertes par la technique”. Certains se défendent en affirmant qu’ils proposent un “bon eugénisme” qui ne supprimerait pas d’individus, mais qui promouvrait de bons gènes. Une argumentation fallacieuse aux yeux du docteur : “Cela reste de l’eugénisme, qui aboutit à hiérarchiser les personnes et induit la tentation de la toute-puissance de l’homme”.
Les scientifiques eux-mêmes demandent des limites
La co-inventrice de l’outil CRISPR-Cas9 Emmanuelle Charpentier déclarait en juin 2014 dans les colonnes du Monde : “Cette technique fonctionne si bien et rencontre un tel succès qu’il serait important d’évaluer les aspects éthiques de son utilisation”. Une préoccupation partagée par l’Alliance Vita, qui demande un moratoire qui permette de sanctuariser l’embryon. Elle a dernièrement mis en ligne une pétition : Oui au progrès thérapeutique, non à l’embryon transgénique.