Pour qu'Aleteia poursuive sa mission, faites un don déductible à 66% de votre impôt sur le revenu. Ainsi l'avenir d'Aleteia deviendra aussi la vôtre.
*don déductible de l'impôt sur le revenu
Dans le classement des personnages hors du commun que compte l’Église, saint Paul tient incontestablement la première place. Ce pharisien, persécuteur acharné des premiers chrétiens, après avoir été terrassé par le Christ sur le chemin de Damas, a mis un zèle décuplé à promouvoir et défendre cette Église qu’il avait abhorrée. Ce juif international a mis à profit sa citoyenneté romaine pour évangéliser l’Empire, lequel recouvrait à peu près l’ensemble du monde connu. Et pour ce faire, il a ardemment désiré se rendre dans la capitale de l’Empire, Rome. Ainsi est-il devenu l’Apôtre des nations.
Le mystère du martyre de Paul
Tout ceci est bien connu grâce aux Actes des apôtres et aux lettres que Paul lui-même a adressées à différentes communautés chrétiennes, dont l’Épitre aux Romains est la plus longue de celles qui nous sont parvenues. Cette dernière est bien sûr une source d’information irremplaçable mais elle en dit plus sur les chrétiens de Rome et sur le salut par la foi que sur le "très vif désir" qui a poussé Paul à visiter cette communauté qu’il n’avait pas fondée. Pourquoi s’est-il rendu à deux reprises dans la Ville éternelle ? Pour y rendre témoignage (Ac 18,2 ; 19, 21), échapper à ses détracteurs (Ac 23,11) en comparaissant devant César en tant que citoyen romain (Ac 27, 1 ; 28,16) répondent les Actes des Apôtres. Mais le récit de Luc s’interrompt brusquement sur l’activité missionnaire que Paul, en résidence surveillée, déploie dans la capitale. Rien sur son martyre, terme de son second séjour !
Rome, cœur et tête de l’Empire
Pour dissiper cette énigme, sur quelles sources s’appuie la tradition ? Outre les textes bibliques, que disent l’archéologie, la littérature antique, les représentations artistiques et les textes apocryphes, les mythes et les légendes, sur le choix de Paul de se rendre dans l’Urbs, la ville par excellence, cœur et tête de l’Empire ? Que représentait-elle à ses yeux ? Quelles ont été les conséquences pour l’Église et pour le monde du double martyre des "colonnes de l’Église", Pierre et Paul, dans la capitale impériale ?
Docteur en théologie biblique et ancien professeur d’exégèse biblique aux Facultés jésuites du Centre Sèvres à Paris, Chantal Reynier nous livre une synthèse très accessible de sa passionnante enquête. On suit avec elle l’apôtre dans les rues de la Rome de Néron, on en respire l’atmosphère grouillante et tumultueuse, on devine les tensions non seulement entre les communautés juives et chrétiennes, mais les dissensions au sein de cette dernière qui ont peut-être coûté la vie à l’ "apôtre des gentils".
Un tremplin pour l’évangélisation du monde
On comprend enfin qu’aux yeux de saint Paul, si Jérusalem était la ville du commencement, Rome représentait plus un tremplin qu’un point d'aboutissement pour l’évangélisation du monde jusqu’aux "périphéries", comme le dit aujourd’hui le pape François. Via Rome, c’était en Espagne que l’infatigable apôtre projetait de se rendre pour porter la Bonne Nouvelle "jusqu’aux extrémités de la Terre". S’il était arrivé à Rome comme prisonnier la première comme la seconde fois, son intention première n’était sans doute pas d’y accomplir une démarche d’oblation semblable à celle du Christ montant à Jérusalem pour y vivre sa Passion. Mais le Ciel avait décidé qu’en offrant sa tête au bourreau "hors les murs" de la ville éternelle, Paul rendrait un témoignage plus fécond encore, indissociable du martyre de Pierre au Vatican. C’est par le sang versé par Pierre et Paul que la ville impériale est devenue la ville apostolique : "Le crime fratricide perpétré par Romulus contre son jumeau Rémus est racheté par la communion fraternelle des deux apôtres, Pierre et Paul", conclut Chantal Reynier. Ainsi l’antique appellation de "Ville éternelle" a-t-elle pris son sens définitif.
Vie et mort de Paul à Rome, par Chantal Reynier, Les éditions du Cerf, 304 pages, 20€.