Pour Jacques Gauthier, François a choisi le bon ton : il dépasse la polémique pour s’intéresser aux cas et aux exemples concrets.
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L’exhortation apostolique Amoris Laetitia (La joie de l’amour) fera couler beaucoup d’encre. François a choisi le bon ton : il dépasse la polémique pour s’intéresser aux cas et aux exemples concrets. Son propos est traversé par un souffle pastoral : il veut une Église soucieuse de la fragilité humaine qui dépasse le code du permis et du défendu. J’ai parcouru rapidement en ligne les 325 numéros, mais il faudra les approfondir, selon le souhait du Pape, “morceau par morceau” (n°7).
Priorité à la conscience
On reconnaît tout de suite le style François : concret, libre, ouvert, nuancé, personnel. Il s’investit lui-même en parlant souvent au “je”. Dans une sorte de “programme” de vie pour les familles d’aujourd’hui, le Pape fait confiance. Il invite les personnes à l’exercice d’une liberté responsable, à l’accueil et au respect de l’autre, à l’éducation des enfants dans la liberté, à la miséricorde en tout temps, loin de toute forme de rigidité. Cette invitation à l’amour interpelle l’Église à “s’inculturer” quand elle doit interpréter certains aspects de la doctrine : “Tous les débats doctrinaux, moraux ou pastoraux ne doivent pas être tranchés par des interventions magistérielles” (n°3). Bref, ce n’est pas nécessaire que tout vienne de Rome, ce qui laisse place aux interprétations diverses. Que de tensions à venir ! Mais il faut faire confiance au sens de la foi des fidèles.
Trois verbes-clés servent de phares ou de balises pour nous guider dans la lecture de ce document très dense et exigeant qui ressemble à un itinéraire spirituel: accompagner, discerner, intégrer. Le pape embrasse large, mais son étreinte n’est pas étouffante. “Le discernement doit aider à trouver les chemins possibles de réponse à Dieu et de croissance au milieu des limitations” (n°305). Il montre que les normes générales ne s’appliquent pas nécessairement à tous de la même manière. “En croyant que tout est blanc ou noir, nous fermons parfois le chemin de la grâce et de la croissance, et nous décourageons des cheminements de sanctifications qui rendent gloire à Dieu” (n°305).
Ce discernement au cas par cas est palpable dans les neuf chapitres. En bon pédagogue, il résume lui-même les grandes lignes de l’exhortation qui paraît en cette Année sainte de la miséricorde :
“Dans le développement du texte, je commencerai par une ouverture inspirée par les Saintes Écritures, qui donne un ton approprié. De là, je prendrai en considération la situation actuelle des familles en vue de garder les pieds sur terre. Ensuite, je rappellerai certains éléments fondamentaux de l’enseignement de l’Église sur le mariage et la famille, pour élaborer ainsi les deux chapitres centraux, consacrés à l’amour. Pour continuer, je mettrai en exergue certains parcours pastoraux qui nous orientent pour la construction de foyers solides et féconds selon le plan de Dieu, et je consacrerai un chapitre à l’éducation des enfants. Après, je m’arrêterai sur une invitation à la miséricorde et au discernement pastoral face à des situations qui ne répondent pas pleinement à ce que le Seigneur nous propose, et enfin je tracerai de brèves lignes de spiritualité familiale” (n°6). Lire la suite sur le blogue de Jacques Gauthier