L’on ne saurait participer, ne serait-ce qu’infinitésimalement, à l’agonie du Christ sans prendre part au rayonnement de sa miséricorde dans le monde.
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Depuis une trentaine d’années, la « pénitence » a mauvaise presse. Trop associée à la punition, elle a été délaissée. Et pourtant, elle représente la vertu, le don, et la paix. Dès lors, pourquoi ne pas s’y mettre ? Pourquoi ne pas accepter, ressentir sa propre souffrance et en faire quelque chose, au lieu de céder à la facilité de la béquille chimique et de s’anesthésier ?
Aujourd’hui, la pénitence est perçue par la société avec sarcasme et dédain, comme une pratique anachronique. Ô pénitents, battez votre coulpe ! Autant de rejets de la conscience catholique. Offrir sa pénitence, voilà un conseil théologique fort qui nous vient directement des Écritures. Je m’en réfère ici à la Lettre de saint Paul aux Colossiens : « Maintenant je trouve la joie dans les souffrances que je supporte pour vous ; ce qui reste à souffrir des épreuves du Christ dans ma propre chair, je l’accomplis pour son corps qui est l’Église. »
En portant une réflexion sur la croix, et sur l’immensité de ce que le Christ a enduré pour nous, nous nous demandons ce qui pourrait bien avoir « manqué » à ses épreuves. Mais alors, le regard posé sur Ses bras grands ouverts, nous voyons une invitation. Si nous acceptons qu’aucun acte dans l’histoire de l’homme ne saurait être comparé à la force, la guérison, le triomphe et la justice dans la souffrance de Jésus de Nazareth sur la croix, alors, en associant nos propres épreuves, mineures ou majeures, à cet acte de générosité et d’abnégation encore vibrant, nous les exposons à toute la bonté qui émane du sacrifice du Christ, et aidons au salut du monde.
Le Christ, dans son agonie et sa mort, nous a baigné dans sa miséricorde.
Faire don de sa propre pénitence, c’est en vérité faire acte de partage de ce salut, et propager l’amour. En offrant nos douleurs, nos souffrances, nos déceptions aux autres, nous accomplissons un acte de rédemption et d’amour.
J’en ai moi-même fait l’expérience, alors que je souffrais d’une pneumonie foudroyante. J’ai prié le Seigneur et ai fait acte de pénitence, en offrant en sacrifice mes souffrances pour ceux qui étaient dans le besoin autour de moi. Ce faisant, j’ai ressenti un soulagement car je joignais ainsi mon maigre acte désespéré, ce germe d’amour qui était le mien, à l’amour infini et miséricordieux du Christ.
Une vérité simple m’est alors apparue : prier pour les autres, souffrir pour les autres, voilà une façon de contrebalancer le poids de nos propres faiblesses, de notre méfiance, haine, et égocentrisme. L’on ne saurait participer, ne serait-ce qu’infinitésimalement, à l’agonie du Christ sans prendre part au rayonnement de sa miséricorde dans le monde. Leçon d’humilité s’il en est, vous en conviendrez. Comment demander la miséricorde et la délivrance lorsque la Croix demande « mais où est ta miséricorde ? ».
Notre époque éclairée porte un regard empreint de scepticisme sur la pénitence, convaincue que la douleur n’a que peu de valeur et doit être vaincue sans attendre. Mais en y associant une prière pour s’en remettre à la croix du Christ, il devient alors possible d’y enjoindre toute la puissance de l’amour comme source de création et de guérison. Et alors, la pénitence, la douleur, la prière deviennent un privilège.