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Hommage au père Michel Jaouen, chevalier des mers

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Arthur Herlin - publié le 07/03/16
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En souvenir du prêtre jésuite décédé le 7 mars 2016, la rédaction d’Aleteia vous propose de relire ses dernières confidences.

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Il y a seulement deux mois, le père Jaouen se confiait à Aleteia, réalisant ainsi son ultime entretien à un média. Affaibli par son grand âge, il n’avait rien perdu de sa vivacité d’esprit, de sa foi profonde et de son cœur tendre. Âgé de 96 ans, le jésuite est décédé ce lundi 7 mars 2016 de sa belle mort. Nous vous proposons de vous replonger dans ses dernières confidences.

Véritable chevalier des mers des temps modernes, le père Jaouen s’est impliqué corps et âme toute sa vie au service des jeunes délinquants. Grâce à des dons et à travers l’association Bel Espoir rendue célèbre par l’émission Thalassa, il a constitué une flottille de voiliers pour emmener ces jeunes en mer. Au fil des années, naviguer s’est avéré être le meilleur moyen pour rompre l’isolement provoqué par les séjours en prison et la dépendance aux drogues et à l’alcool. 

L'un des voiliers sur lequel a navigué le Père Jaouen

© association ajd
L’un des voiliers sur lequel a navigué le Père Jaouen

Aleteia : Comment avez-vous commencé à vous impliquer auprès des jeunes délinquants ?
Père Michel Jaouen : Je suis né à Ouessant et suis rentré au collège jésuite de Brest. J’ai toujours eu la foi et la religion a toujours été très présente dans ma famille, une évidence au même titre que la mer. Cela m’a donc aidé à devenir jésuite. J’ai alors fait mes études à Lyon où j’ai commencé dès 1939 à m’occuper des délinquants en réinsertion. On organisait déjà des vacances pour les plus jeunes. Nous étions très bien reçu par les institutions pénitentiaires, parce qu’il n’existait absolument rien pour s’occuper d’eux. Après quelques années, je suis monté sur Paris où je suis devenu aumônier de la prison de Fresnes. C’est ainsi que j’ai construit un foyer pour les jeunes délinquants de 150 places à porte de Clichy.

michel Jaouen

C’est donc à la prison de Fresnes que vous avez pris conscience du drame des prisons ?
Oui. J’y ai vu les pires choses que vous ne pourrez jamais imaginer. De tout temps, on y met des gosses qui deviennent des truands. À vivre les uns avec les autres, les délinquants se fabriquent “entre eux”. Et lorsqu’ils sortent, sans un sou, parfois sans papiers, sans travail, ils n’ont qu’un seul choix : retourner dans la délinquance. Évidemment il n’y a pas de solution alternative, mais il n’en existera pas tant que l’on ne verra pas les choses en face.

Je reste persuadé qu’il ne suffit pas d’améliorer les conditions de vie des prisonniers, il faut les fermer ! Il faut essayer de nouvelles choses, et surtout ne pas les laisser entre eux. Il n’y a rien de plus mauvais. De quoi voulez-vous que parlent deux criminels ensemble ? De truanderies, rien d’autre. Il faut les sortir de cet environnement destructeur, leur donner une formation professionnelle, du boulot et un logement. C’est regrettable qu’aujourd’hui il n’existe rien de tout cela.

Comment vous est venue l’idée de faire des sorties en mer ? 
C’est en faisant ce constat que j’ai décidé de me procurer des bateaux pour sortir les jeunes délinquants de ce véritable cercle vicieux. Comme j’ai toujours su naviguer, c’est la première idée qui m’est venue. Dès les premières sorties en mer, j’ai pu remarquer que ces jeunes étaient parfaitement impliqués. Ces gamins qui avaient perdu tout intérêt pour quoi que ce soit, les voilà soudainement intéressés pour quelque chose. L’avantage du bateau c’est que l’on voit du pays dans tous les sens du terme : les jeunes rencontrent de nouvelles personnes, c’est salvateur.

Si tu aimes d'un amour vrai, Dieu est avec toi

Si tu aimes d’un amour vrai, Dieu est avec toi

Comment avez-vous vécu votre foi au contact de ces jeunes délinquants ?
La meilleure chose que l’on peut faire quand on a la foi, c’est de la vivre. Cela pose au départ des problèmes aux gens mais cela finit par les intéresser. Ils voient et y croient par conséquent. Si on se contente de faire du baratin, on n’atteint personne. Nombreux sont les délinquants que j’ai connus et qui sont revenus à la foi après avoir reçu ce qu’on leur a donné. Je ne compte plus ceux qui se sont fait baptiser. Deus Caritas est, Dieu c’est l’Amour. Si tu aimes d’un amour vrai, Dieu est avec toi. Sans ça, tu n’aimerais pas. Et il faut aimer d’un amour qui nous pousse à nous donner pour eux. Le don de soi est la meilleure expression de la présence de Dieu en nous.

Dans quel état d’esprit abordez-vous la fête de la Nativité ?
Je vous dirais qu’actuellement les fêtes de Noël me scandalisent un peu. On ne parle uniquement que de colis, de cadeaux, de paquets. Parmi ceux qui vont fêter Noël, je suis certain qu’une flopée ne savent même pas que le Christ est la seule et unique raison de cette fête. Quand vous regardez la télévision, que ce soit les médias ou les divertissements, tous parlent de Noël mais aucun ne parle de Jésus Christ. Il est pourtant né sur la paille, sa mère a accouché dans une grange, parce qu’ils étaient en train de fuir les Romains. C’est pourtant ce que subissent les migrants, cela devrait les émouvoir.

Propos recueillis par Arthur Herlin

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