Pour qu'Aleteia poursuive sa mission, faites un don déductible à 66% de votre impôt sur le revenu. Ainsi l'avenir d'Aleteia deviendra aussi la vôtre.
*don déductible de l'impôt sur le revenu
Aleteia : Qu’est-ce qui vous a amené à vivre en Amérique latine ?
Romain de Chateauvieux : Lorsque j’étais étudiant en architecture, j'ai passé un an à l’université catholique de Santiago du Chili. Alors que je redoublais mon premier semestre, j’ai appris que le curé de ma paroisse se rendait au Brésil dans une favela de Salvador de Bahia. Je l’ai aussitôt rejoint. J’ai découvert ce que c’était de vivre parmi les pauvres, les prostituées et les drogués.
Avant son voyage de 1980, pour s’assurer que c’était bien l’une des zones les plus pauvres du Brésil que Jean Paul II comptait visiter. Il avait envoyé Mère Teresa en reconnaissance. Une fois sur place, elle n’avait pu qu’attester du niveau extrême de désœuvrement de la population locale. Il a alors fallu que l’on érige une église pour accueillir le Pape. C’est ainsi que Notre-Dame des Alagados a vu le jour. Alagados, désigne le quartier qui a été construit sur des marécages, les égouts de la ville de Salvador en vérité.
Quand avez-vous compris que vous deviez vous engager plus profondément ?
Pendant ces trois mois, j’ai vécu une véritable conversion. J’ai été invité le Vendredi Saint à parcourir et méditer le chemin de croix en incarnant le rôle de Jésus au beau milieu des favelas. À son terme, je suis allé porter un médicament à un malade. Il s’est mis à pleurer lors de notre rencontre. En le consolant, j’ai vécu une rencontre profonde avec le Christ pauvre et souffrant. J’ai entendu alors dans mon coeur : "Romain, le bonheur que tu recherches, c'est en te mettant au service des pauvres que tu le trouveras". Le point de non-retour était franchi. J’ai senti ce jour-là que le Seigneur m’appelait à donner ma vie pour l’Église, au profit des plus démunis.
Comment votre route a-t-elle croisé celle de Rena, votre épouse ?
Rena est née au Brésil, dans une famille très modeste et loin d’être religieuse. Son père battait sa mère qui s’est enfuie avec ses enfants. C’est à 16 ans qu’elle a rencontré le Christ à travers les Écritures en ouvrant une vieille Bible. Elle a été bouleversée par le message d’Amour qu’elle y a trouvé. Elle a réalisé qu’elle pouvait être aimée et qu’elle aussi avait la dignité d’aimer le Seigneur. Rena s’est aussitôt rendue dans la première église venue, ce fut celle Notre-Dame des Alagados.
Très vite, elle a rejoint la Communauté Bernadette fondée par Dominique You. Et lors de mon séjour dans cette communauté, nous nous sommes liés d'une amitié profonde. Nous sommes tombés amoureux. Néanmoins, nous avions décidé dans notre cœur de ne pas pertuber le chemin de Dieu, dans notre vocation respective. Au moment de rentrer en France pour terminer mes études, nous avons remis entre les mains du Seigneur cette amitié si belle en choisissant de ne pas nous donner de nouvelles. Un an et demi plus tard, nous nous sommes finalement retrouvés. En relisant le travail de Dieu dans nos cœurs nous avons reçu notre vocation commune : être un couple missionnaire pour l’Église et pour les plus pauvres. Un an plus tard, nous nous sommes mariés à la paroisse Notre-Dame des Alagados.
La décision de mettre sa vie au service des plus pauvres s’est-elle faite naturellement ?
Nous avons demandé trois grâces au Seigneur comme "cadeau" de mariage. La prière comme moyen le plus efficace pour changer le monde. La grâce de la simplicité de vie. Et enfin la grâce d’être missionnaire jusque dans l’Éternité. En 2007, nous avons été envoyés en mission par une ONG de solidarité internationale. Contre toute attente, nous avons été envoyés deux ans à Atlanta aux États-Unis dans un ghetto de Sud-Américains. Tout était alors à faire…
Quelle "stratégie" avez-vous alors mise en place ?
Nous avons appliqué la méthode que nous avons apprise dans les favelas : vivre en frères avec les habitants, partager leur quotidien, écouter leurs besoins et leurs réalité pour petit à petit développer ensemble des solutions concrètes. En mettant notre cœur à l’écoute, nous nous laissons blesser par toutes ces douleurs chaque fois différentes. Dès lors, il est possible de discerner la solution à mettre en place. C’est ainsi que nous avons commencé par proposer des cours d’anglais. Après quelques temps, le centre Jean-Paul-II a vu le jour dans une ancienne imprimerie qui faisait office de centre missionnaire,. Nous y avons déployé des projets sociaux comme une banque alimentaire, un vestiaire. Et en parallèle des projets pastoraux comme du catéchisme, la prière du chapelet, des visites à domicile et la célébration de la messe.
Pourquoi avoir choisi de vous établir au Chili où vous êtes encore actuellement ?
Un schoolbus américain reconverti en maison-missionnaire ! Au terme de notre mission, les Sud-Américains avec lesquels nous vivions nous ont invités à nous rendre dans leurs pays, en Amérique latine. Nous avons été envoyés en mission par la Conférence épiscopale d’Amérique latine (Celam). Ainsi, nous avons visité 16 pays en trois ans. Nous sommes établis dans neuf d’entre eux. Nous y avons développé des projets de développement comme une clinique au Guatemala ou d’autre projets liés à l’éducation et l’agriculture. Ensemble, nous avons aussi mis en place des projets pastoraux visant à redynamiser les communautés ecclésiales vers lesquelles nous étions envoyés.
À la fin de notre mission, la Conférence des évêques du Chili, avec qui nous étions plus particulièrement en lien, nous a invités à nous établir à Santiago, à la Pincoya, l’un des plus vieux bidonville de la capitale. Voilà comment nous nous sommes retrouvés auprès des Chiliens les plus démunis.
Pratique