En 2016, année de la miséricorde, le recteur du sanctuaire Notre-Dame du Laus invite à vivre la révolution de la tendresse du Christ.
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Le père Ludovic Frère est recteur du sanctuaire de Notre-Dame de Laus et vicaire général du diocèse de Gap et d’Embrun. Dans un livre allègre et réjouissant, La tendresse de Dieu, il rappelle la manifestation du Christ aux hommes : par la tendresse, qui est une façon pleine de respect d’offrir son amour.
Aleteia : La tendresse est l’expression de l’amour de Dieu. Or même les athées ont besoin de tendresse. Est-ce qu’on peut y voir chez eux une quête de transcendance ?
Père Ludovic Frère : Tout à fait. Toutes les aspirations profondes de vérité, de justice, de paix, de bonheur qui habitent l’être humain ont été déposées par Dieu dans les cœurs, et c’est l’Esprit Saint qui agit en nous pour nous donner envie de les mettre en application. C’est pour cela que l’Église a toujours eu un message à vocation universelle. Nous, en tant que chrétiens, sommes donc appelés à rejoindre les autres dans ce qui les habite car c’est la même essence qui est en nous tous.
La tendresse de Dieu est à chaque page du Nouveau Testament. Elle est en revanche parfois plus difficile à voir dans l’Ancien Testament.
La logique du Dieu violent de l’Ancien Testament contre le Dieu gentil du Nouveau Testament n’est vraiment pas la réalité des textes, même s’il est clair que l’on trouve des actes de violence dans l’Ancien qu’on ne retrouvent pas dans le Nouveau. Mais la révélation est progressive et à ce titre on ne peut pas attendre du prophète Jérémie qu’il dise la même chose que Jésus. L’humanité n’est tout simplement pas prête. La Bible est un cheminement, et nous aussi nous sommes en cheminement pour découvrir qui est Dieu.
Par exemple, le prophète Élie croit recevoir la mission de prouver que son Dieu est le vrai. Il fait un combat avec les prophètes de Baal et gagne en invoquant son Dieu. Mais ensuite, il égorge les prophètes de Baal pour leur montrer qu’ils avaient tort. On est là dans une perception erronée de qui est Dieu. Ensuite Élie part au désert où il a la révélation de Dieu qui n’est “ni dans l’ouragan ni dans la tempête mais dans la brise légère”. Comme tout croyant, Élie a donc un parcours dans sa découverte de Dieu.
Non seulement les croyants ont une progression mais l’humanité aussi. Le projet de Dieu est dans la fidélité, pas nécessairement dans les actes de son peuple. Les événements vécus par le peuple sont aussi réinterprétés en fonction de la mentalité de l’époque. Je ne nie pas la violence de certaines pages de la Bible, mais il faut les lire avec un esprit historico-critique et en discuter le contexte pour être plus proche de la vérité de Dieu. Si l’on s’interdit cette relecture historico-critique on tombe dans le fondamentalisme.
Il eut arriver de douter de l’Amour de Dieu. Comment les marques de tendresse en ce monde peuvent-elles nous aider à avoir foi en la tendresse d’en-haut ?
Il m’est arrivé de douter de l’existence de Dieu, jamais de son Amour. Douter de ma manière de Le comprendre, oui, et de me dire qu’une fois devant Lui je me rendrai compte que j’ai mal parlé de Lui parce que j’ai mal compris une partie de Son message. Mais en même temps, être un homme et essayer de parler de l’Amour infini, c’est forcément réducteur. Je parle avec des mots humains à des esprits humains.
Donc je ne doute pas de l’Amour de Dieu. Mais face à quelqu’un qui douterais, je lui dirais de commencer par réfléchir à ce qui nous habite. Cela arrive de rencontrer des gens qui voient plus un Dieu sévère, alors j’essaie de les renvoyer à ce qui les habite en profondeur. Nous avons été créés à l’image et à la ressemblance de Dieu, ce qu’il y a au plus profond de nous c’est ce qui est le plus franc reflet de ce qu’est Dieu. Et au plus profond de nous, sauf à avoir été profondément blessé par une histoire personnelle – et encore – il y a la perception que nous sommes faits pour aimer et que l’on veut le bien des autres. Pour moi c’est la trace de Dieu en nous. Une auteur juive morte à Auschwitz décrivait l’expérience des camps en disant que, malgré l’horreur, il lui suffisait de trouver une seule personne avec un comportement humain pour croire en l’humanité.
Propos recueillis par Camille Tronc
Retrouvez la première partie de cet entretien ici
La tendresse de Dieu de Ludovic Frère. Éditions Artège, 2015, 240 pages, 15,90 euros.