Honte à vous, si vous ignorez qui est Sir William Osler.
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Cela peut paraître un peu dur. Mais si vous pratiquez la médecine et que vous ne connaissez pas le père de la médecine moderne et de la médecine interne, vous pourriez être accusés de péché grave. Car cet homme était extraordinaire.
Fils d’un prêtre missionnaire anglican envoyé au Canada au XIXe siècle, il s’est découvert une passion pour le monde que lui a révélé le microscope. Formé à l’École de médecine de Toronto et à l’Université McGill, il pratiquait des autopsies tout en enseignant de manière pratique et compréhensible. Insatiable curieux, sa recherche et ses écrits portent sur des centaines de sujets comme le cancer du poumon du mineur. Il a écrit Les principes et la pratique de la médecine, un manuel qui fait autorité en matière de soins des patients et publié pendant plus d’une centaine d’années. Son influence se ressent encore dans la pratique de la médecine aujourd’hui.
Osler était un homme agréable, un mari aimant et un père dévoué pour son fils unique. Bien que toujours débordé, il était très généreux de son temps avec les amis, la famille et les personnes qui en avaient besoin. Il semblait réellement être le plus grand des médecins.
C’est pourquoi j’ai été frappé par sa pire erreur.
Au cours de sa vie, Osler a vécu la véritable révolution de la modernisation de la médecine, le “progrès”. Les progrès de la médecine ont amené Osler à croire qu’aucun défi humain n’était insurmontable. Que le progrès seul – et l’énergie dépensée à le mettre en œuvre – valait qu’on y consacre son existence. C’est sur la pente de cette conviction que le plus grand des médecins a dérapé :
“Que dire de votre épouse et de vos enfants ? Ne vous en préoccupez pas. Bien que vous soyez responsable de ceux qui vous sont chers, cette charge est de loin surpassé par le poids de votre responsabilité vis-à-vis de vous-même, de votre profession et de votre public. Votre épouse se réjouira de prendre part à votre sacrifice.”
La Grande guerre éclata. Les ravages dantesques du conflit furent rendus possibles grâce à la science, la technologie, l’industrialisation, les moyens modernes de combattre. Le fils unique d’Osler est tué par les hommes et leurs machines et son père est écrasé de chagrin. En 1919, à l’âge de 70 ans, deux ans après la mort de son fils, il contracte la grippe espagnole et succombe deux mois plus tard d’une pneumonie.
Sir William Osler était sans nul doute, un des plus grands médecins et un homme bon. Mais la pire erreur du plus grand médecin a été d’oublier le mal que l’homme est capable d’infliger. Son erreur de diagnostic était innocente, le fruit d’un optimisme indécrottable.
L’Église a enseigné beaucoup de choses, dont trois vérités fondamentales qui sont au centre du catholicisme et ont été vérifiées à maintes reprises :
- L’homme est digne de Dieu ;
- L’homme a chuté ;
- L’homme peut se racheter.
Le fait que l’homme ait chuté est essentiel dans l’histoire. Le diplomate américain, George Kennan disait : “Bien enfoui en chacun d’entre nous, existe un peu de totalitarisme. Ce n’est que la lumière de la confiance et de la sécurité qui maintient ce mauvais génie à l’écart”. Comme l’indique le dissident soviétique Alexandre Soljenitsyne, “la frontière qui sépare le bien et le mal ne passe pas par les États, les classes, ou les partis, mais passe directement par le cœur de l’homme.” L’auteur catholique Sigrid Webster conclut : “On ne peut accuser le christianisme de ne pas être conscient que la méchanceté et la stupidité sont sans fin. [Mais le christianisme suppose également] que la bonté et la sagesse sont sans fin et que l’homme peut en tirer bien plus qu’il n’imagine.”
En effet, nous constatons que nous ne sommes pas invincibles mais humblement dépendants de Dieu lors de notre cheminement dans le monde. Pour reprendre les mots du pape Benoît XVI, “avoir l’espoir chrétien signifie connaître l’existence du mal et néanmoins aller vers l’avenir avec confiance. “Dieu est grand, Dieu est bon”, dit la prière de notre enfance. Sir William Osler était un grand homme et un homme bon, mais pas plus. Il est bon de connaître son histoire pour s’épargner la même erreur.