Le tournant diplomatique opéré par le président Obama vis-à-vis de l’Iran a mis au grand jour les fragilités de l’Arabie saoudite, dont la position géopolitique avait été artificiellement gonflée par le soutien américain.
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Cette fragilité est tout d’abord d’ordre culturel : à la culture nomade qui donne très tardivement naissance à l’Arabie saoudite en 1932 s’oppose en effet le vieil État iranien, qui a plusieurs milliers d’année d’ancienneté et se plait à narguer sa rivale du haut de son histoire. La seconde fragilité est d’ordre économique. L’appareil productif saoudien est en effet fondé sur la monoproduction du pétrole dont la rente déclinera à compter de 2028.
Or la demande interne infléchit les exportations à la baisse. Entre 2004 et 2015 par exemple, les exportations ont diminué de 1,4 % par an. Les recettes pétrolières représentent 80% du budget de l’État. Si celles-ci diminuaient des troubles pourraient s’en suivre. En effet, la baisse des subventions intérieures a été historiquement à l’origine des printemps arabes. La fragilité est aussi climatique : avec l’augmentation des températures, la sécheresse s’est développée alors même que 80% de la nourriture est déjà importée. La fragilisation saoudienne est enfin d’ordre démographique : 31 millions de Saoudiens font face à 77 millions d’Iraniens soutenus par une politique nataliste depuis 2009.
La fuite en avant saoudienne
Consciente de ses multiples fragilités, l’Arabie saoudite s’est lancée dans une fuite en avant irrationnelle. Celle-ci est tout d’abord d’ordre militaire. Face à une armée iranienne de 550 000 hommes dont 125 000 pasdarans, l’Arabie saoudite n’aligne que 230 000 soldats dont la qualité est très inégale. Qui plus est, les querelles sont fréquentes au sein de l’armée des princes saoudiens où les disputes dynastiques rejaillissent sur le corps des officiers. Face à ses faiblesses humaines dans le domaine militaire, le gouvernement a décidé d’acquérir la meilleure technologie occidentale afin de pouvoir surclasser sa rivale iranienne.
Le deuxième champ de compétition est d’ordre géopolitique. Iran et Arabie Saoudite mènent divers conflits par procuration notamment à Bahreïn, où la population chiite arabe est courtisée conjointement par Wahhabites et Iraniens. Les conflits se cristallisent aussi sur les lieux de pèlerinage, notamment à La Mecque ou bien sur les théâtres où est présent l’État islamique. Le dernier aspect de la fuite en avant saoudienne est d’ordre économique. L’Arabie exporte six fois plus de pétrole que l’Iran, disposant de cinq alliés au sein de l’OPEP, elle agit actuellement à la baisse sur le prix du baril afin de noyer son adversaire iranien sous un pétrole bon marché.
Les tensions sont donc vives mais ne doivent pas être exagérées pour autant. Après tout, une rupture diplomatique avait déjà eu lieu en 1988, suivie par une réconciliation deux ans plus tard. Parmi les arbitres d’un futur retour au calme, l’on peut imaginer l’Irak, mais également les États-Unis qui se retrouvent aujourd’hui dans une situation proche de celle précédent la révolution islamique de 1979 : celui d’un arbitre potentiel entre deux puissances concurrentes.