L’inégale répartition des tâches ménagères au sein du couple constitue fréquemment un sujet d’incompréhension et les disputes qui en résultent ne sont prosaïques qu’en apparence.
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Démonstation
Les hommes ont généralement un seuil de tolérance au désordre et à la poussière plus élevé que celui des femmes et ils se projettent moins facilement qu’elles dans l’avenir. Par conséquent ils anticipent moins leurs propres besoins. Ces tendances sont des tendances lourdes : elles préexistent à la formation du couple et ne disparaissent pas sous prétexte qu’un homme et une femme décident d’emménager ensemble ou de devenir parents.
En fait rien ne change vraiment chez l’homme ou chez la femme : ni la sensibilité à l’environnement, ni le niveau d’exigence, ni les réflexes. Là où Madame verra un désordre intolérable et un niveau de saleté insoutenable appelant des mesures énergiques et immédiates, Monsieur ne verra rien d’insupportable. Dans le meilleur des cas il trouvera le diagnostic largement exagéré et dans le pire des cas – qui est également le plus fréquent – il ne verra même pas de quoi on lui parle.
C’est donc seule que Madame prendra l’initiative du rangement et du ménage. Si on lui demande pourquoi elle se charge de l’essentiel des tâches domestiques, la probabilité est très forte qu’elle réponde : parce qu’il faut bien que quelqu’un le fasse. Réponse sincère mais inexacte. La réponse exacte serait plutôt : parce que je voudrais que les choses soient faites maintenant et pas plus tard.
En fait, Madame gère son foyer comme si elle était encore célibataire : elle n’a rien changé de ses habitudes ni de son niveau d’exigences. Ce faisant, et tout en étant persuadée du contraire, elle se comporte exactement comme monsieur qui, lui non plus, n’a pas changé ses habitudes ni modifié son comportement. Sauf qu’il le vit mieux puisqu’il en fait moins.
Ce constat nourrit chez Madame un sentiment d’injustice et de rancœur. Ce mélange n’a rien d’étonnant mais il est d’autant plus détonant que, la plupart du temps, Monsieur ne se doute de rien. Et quand Madame lui adresse des reproches d’autant plus vifs qu’elle les a gardés longtemps, Monsieur tombe des nues. Il ne comprend vraiment pas ce qu’elle lui reproche et se demande sincèrement où est ce problème qu’il ne le voit pas.
Madame, elle, voit très bien où est le problème. C’est tellement évident ! C’est tellement évident qu’elle ne peut même pas concevoir que monsieur ne le voie pas. Fort logiquement elle en conclut que si monsieur s’obstine à prétendre le contraire c’est qu’il s’obstine à nier l’évidence. Non seulement il est fainéant mais en plus il est de mauvaise foi !!!
Le dialogue de sourds peut alors commencer :
Lui : Mais pourquoi m’agresses-tu pour cette histoire de verre laissé sur la table du salon ? C’est odieux de me prendre à partie ainsi. Je ne t’ai rien fait !
Elle : Justement tu ne fais rien. C’est toujours moi qui fais tout dans cette maison.
Lui : Mais je ne t’ai jamais demandé d’en faire autant !
À ce stade d’incompréhension, Madame et Monsieur se trouvent à la croisée des chemins : soit ils campent sur leur position et s’enferment dans le silence jusqu’au prochain conflit, soit ils décident d’en parler.
Dans le premier cas ils risquent se laisser entraîner dans le cycle infernal des reproches mutuels et des accusations croisées.
Madame maudira la paresse et l’hypocrisie de monsieur qui, objectivement, continuera de lui laisser tout faire et ne s’en porte pas plus mal. Monsieur, lui, comprendra de moins en moins que madame se charge de tâches ménagères dont l’urgence ne lui saute pas aux yeux et dont la fréquence lui paraîtra complètement délirante. Il finira par renoncer à comprendre et le silence s’installera, entrecoupé de scènes de ménages pénibles. La vie de couple finira par se par se dissoudre naturellement faute de n’avoir plus rien à échanger que des récriminations.
Dans le second cas ils peuvent raisonnablement espérer qu’à force de discussions, d’explications et d’écoute ils parviendront à se mettre d’accord sur une règle du jeu commune qui permettra à l’avenir de conjuguer spontanéité et sérénité. Un tel accord sera le résultat d’une négociation c’est-à-dire le fruit d’un compromis, à l’image d’un peuple qui se dote d’une constitution politique.
Il ne satisfera pas toutes les aspirations spontanées de Madame et de Monsieur mais il permettra à leur relation de progresser au fur et à mesure que chacun sortira de lui-même pour se décentrer et intégrer dans ses choix le point de vue et l’intérêt de l’autre.
C’est à ce prix que leur relation deviendra une relation d’amour et non plus simplement ou d’abord une relation de confort dans un cas et de domination dans l’autre.
Un tel modus vivendi est le résultat d’une construction, souvent laborieuse et jamais achevée. Un compromis se construit, à l’image de la vie de couple elle-même. On n’a jamais fini d’apprendre à aimer et cet apprentissage n’a rien de très spontané.
Aimer n’est en effet jamais facile et rarement confortable : nous avons tous spontanément envie d’être aimés mais nous n’avons pas spontanément envie d’aimer.
Pourtant aimer est notre vocation à tous, que l’on vive en couple ou pas…