En ce 14 décembre, fête liturgique de saint Jean de la Croix (1542-1591), Jacques Gauthier se remémore sa rencontre avec ce grand poète mystique.
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J’avais 21 ans lorsque j’ai lu ses écrits pour la première fois. Je vivais alors à l’Arche de Jean Vanier en France, en réponse à une redécouverte de Jésus et de son Église. Tout me déconcerta dans cette œuvre : les symboles poétiques, l’anthropologie médiévale, la théologie scolastique. Pourtant, cette lecture me marqua au plus profond de l’être, car une soif ardente de connaître Dieu m’animait. Je trouvais enfin quelqu’un de fiable qui répondait à ma quête spirituelle en me proposant des moyens concrets pour aller à Dieu dans la joie et l’espérance.
Le poète espagnol présentait clairement et lucidement les grands éléments de la vie intérieure, ses nuits et ses aurores, ses exigences et ses illusions. Ses mots me brûlaient de l’intérieur, sans que je cherche vraiment à les comprendre. Je me laissais plutôt prendre par son élan d’amour du Christ. J’entrais dans son univers poétique comme si j’écoutais de la musique, en m’abandonnant à ses paroles qui donnaient une large place au silence. La lecture se transformait en prière de désir, et parfois en contemplation. J’étais touché par ce qui m’était donné gratuitement et qui ne pouvait venir que de Dieu, tant cela était doux et pacifiant. “Plus Dieu veut donner, plus Il fait désirer, jusqu’à faire en nous le vide complet, pour nous remplir de ses biens” (Lettre à mère Éléonore de Saint-Gabriel, 8 juillet 1589).
Jean de la Croix m’est apparu sous un jour nouveau lorsque j’entrepris quelques années plus tard d’écrire sur son illustre fille spirituelle, Thérèse de Lisieux. À la suite de Thérèse, je redécouvrais l’ami qui décrivait la pratique de l’union avec Dieu. Je retrouvais les mêmes thèmes : la primauté de l’amour, la grandeur de l’humilité, Dieu qui a soif d’être aimé, la vie d’oraison, la valeur purificatrice de la souffrance liée à l’amour, la charité fraternelle, l’importance de ne s’appuyer que sur Dieu, la volonté de n’être rien pour laisser la place au Tout, le combat spirituel, la nuit de la foi, l’union transformante de l’âme en Dieu, la brûlure d’amour de l’Esprit Saint. “La nouvelle et bienheureuse vie qui s’obtient par le moyen de la nuit obscure, c’est l’état d’union avec Dieu” (La Nuit Obscure 2, 9).
Saint Jean de la Croix reste pour moi un vrai guide spirituel qui peut indiquer aux chercheurs d’aujourd’hui les étapes de la prière et les voies de l’union avec Dieu. L’Église le reconnaît d’ailleurs comme le docteur mystique par excellence. Ce maître exigeant et rassurant n’appartient pas au passé. Il se trouve là, près de nous, dans la communion des saints, toujours aussi actuel dans sa quête de Dieu et dans la beauté de sa poésie. L’absolu de son amour transcende les temps. Ses paroles lumineuses coulent de source, c’est-à-dire de l’Évangile.
Ses œuvres spirituelles
Les poèmes ou chansons de Jean de la Croix, édités un peu partout, figurent parmi les plus beaux de la langue espagnole. Ce sont des joyaux de la littérature universelle. Il en a écrit très peu, une quinzaine, avec quelques romances. Sa poésie se fonde dans son message, formant la substance de son œuvre unifiée, l’expression de sa théologie mystique. Cette poésie à l’incandescence amoureuse témoigne de cette lumière qui brûle dans son cœur mieux que la lumière de midi. Elle lui offre un langage ordonné au chant et porteur lui-même d’un désir, ouvert sur autre chose que ce qu’il nomme, ce “je ne sais quoi” que son cœur désire obtenir, mais c’est de nuit. Lire la suite sur le blogue de Jacques Gauthier