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Au service de la vie et par amour des plus faibles

Thierry de la Villejégu

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Marie-Ève Bourgois - publié le 23/11/15
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Rencontre avec Thierry de la Villejégu, directeur général de la fondation Jérôme Lejeune.

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Thierry de la Villejégu est directeur général de la fondation Jérôme Lejeune. Créée en 1996, la fondation est spécialisée dans la recherche et le traitement des maladies génétiques de l’intelligence et notamment de la trisomie 21 à laquelle était consacrée le 20 novembre.

Aleteia : Quels sont les moyens financiers et humains mis en œuvre pour approfondir la recherche sur la trisomie 21 ?
Thierry de la Villejégu : La fondation dispose tout d’abord d’une expérience unique sur les maladies génétiques de l’intelligence grâce aux travaux de médecin et de chercheur de Jérôme Lejeune débutés en 1952. Cet homme droit et courageux, qui a découvert la trisomie 21, nous inspire tous. Pour poursuivre ses recherches, la fondation Jérôme Lejeune, présidée par Jean Marie Le Méné, a été créée en 1996, deux ans après sa mort, et l’institut un an plus tard. L’Institut propose à ses 8000 patients, dont 80% souffrent de trisomie 21, une consultation spécialisée grâce à une équipe pluridisciplinaire composée d’une vingtaine de professionnels. La fondation est financée à 100 % par des dons privés ; elle ne reçoit aucune subvention publique. Elle est quasi seule à financer la recherche thérapeutique sur la trisomie 21 et a dépensé quatre millions d’euros pour la recherche en 2014. Montant important, mais insuffisant pour soutenir les nombreux projets existants, développés en interne à l’institut ou en partenariat avec des équipes extérieures.

Pourquoi avoir accepté ce poste de directeur général ?
Il s’agit tout d’abord d’un enjeu humain et intellectuel à relever pour défendre des personnes fragilisées par leur handicap mais aussi socialement. Les personnes trisomiques sont peu ou pas considérées, voire parfois expulsées de la société à travers des pratiques eugéniques. Il faut savoir que 96% des enfants détectés trisomiques in utero font l’objet d’un avortement. Les sauver est une cause vitale et urgente, mais aussi un défi passionnant sur le plan de la pensée et de l’action. A la fondation on travaille non seulement à la promotion de la recherche thérapeutique pour améliorer la vie des patients mais aussi à la reconstruction de l’image de la personne déficiente. Ce travail scientifique, médical, juridique et de communication, permet de participer à une œuvre de justice très motivante.

Quel est votre point de vue sur le droit à la vie ? 
Pour parler de droit à la vie, parlons d’abord de la vie, du caractère unique de chaque être, avec tout ce qu’il représente de mystères et de promesse, de la diversité de la vie, des êtres et des situations qui doit nous inspirer admiration et respect. La vie est un tout. On ne peut pas choisir de la réduire ; c’est ce tout de la vie qui la caractérise ! Une société qui respecte la vie est une société qui s’ouvre au monde. L’avortement rétrécit le droit à la vie. Il faut davantage parler et débattre de ce phénomène. Derrière lui se cache la question du bonheur. L’IVG n’est-elle pas une réduction de soi – je m’interdis de tenter la vie – et une réduction du don de soi, c’est-à-dire de l’amour ? A l’inverse, les travaux scientifiques de Jérôme Lejeune et son engagement auprès de ses patients ouvrent les portes de la vie en reconnaissant la dignité de chaque être humain et la richesse de son unicité.

jerome lejeune

Le Professeur Jérôme Lejeune, découvreur de la trisomie 21.

Comment allez-vous vivre cette journée nationale de la trisomie 21 ?
La fondation mène des actions toute l’année. Cette journée nationale a le mérite de figer dans un agenda un rendez-vous annuel avec la trisomie 21. C’est louable. Mais cette journée a tendance à occulter une partie de la question. En effet, c’est bien de traiter les besoins des personnes trisomiques vivantes ; mais pourquoi ne pas aborder aussi la question de l’accueil de l’enfant dépisté positif à la trisomie. La vie de chaque être humain va de la conception à la mort naturelle. Pourquoi pas celle d’un être humain trisomique ? Là commence la discrimination.

Quel jugement portez-vous sur la couverture de Charlie Hebdo qui titrait en octobre dernier : “Morano, la fille trisomique cachée de de Gaulle” ?
Cette une est caricaturale à bien des titres. Elle surfe sur le préjugé que la personne trisomique est le symbole de l’imbécile et du monstre de service. En voulant dénoncer le racisme de Nadine Morano, Charlie Hebdo s’est montré profondément raciste envers les personnes atteintes de trisomie 21, ce qui est tout aussi condamnable. Nous avons reçu beaucoup d’appels et de messages de familles qui se sont émues et ont été blessées.

Comment voyez-vous l’avenir ? 
Notre combat est absolument éternel. Il y aura toujours dans nos sociétés des personnes qui tireront sur les plus faibles. C’est un combat constant de civilisation. Aux côtés de tant d’autres, je me sens appelé en tant que chrétien et citoyen à me mettre au service de la vie des plus faibles qui sont bien souvent nos maîtres de vie. Malgré les grandes difficultés rencontrées dans cette mission, et les tentations de parfois baisser les bras, nous devons cultiver l’espérance. Si nous ne croyons plus en l’Homme, les plus fragiles disparaîtront aussitôt. Puis nous tous.

Propos recueillis par Marie-Ève Bourgois

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