Identifié parmi les djihadistes tués au cours de l’assaut à Saint-Denis, Abdelhamid Abaaoud, le commanditaire présumé des massacres du 13 novembre, n’avait d’exceptionnel que sa cruauté.
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À présent, les enquêteurs en sont sûrs : le corps criblé d’impacts dans l’immeuble pris d’assaut à Saint-Denis, dans la nuit du 18 novembre, par les hommes du Raid et de la BRI, est bien celui du commanditaire présumé des attentats du 13 novembre. “Abdelhamid Abaaoud vient d’être formellement identifié, après comparaison de traces papillaires, comme ayant été tué au cours de l’assaut”, a déclaré en début d’après-midi, ce 19 novembre, le procureur de la République François Molins, chargé de l’enquête sur les attaques terroristes qui ont fait 129 morts et plus de 350 blessés à Paris et Saint-Denis.
“Inspirateur de très nombreux projets d’attentats ou attentats terroristes en Europe”, selon François Molins, l’homme était connu comme le loup blanc des services de renseignement ce qui démontre à nouveau les failles de ceux-ci et la porosité des frontières de l’UE.
Distingué par son cynisme et sa cruauté
Abdelhamid Abaaoud, 28 ans, avait la double nationalité marocaine et belge. Parti faire le “djihad” en Syrie l’an dernier, il s’était distingué parmi les combattants francophones de l’État islamique par son cynisme et sa cruauté complaisamment mis en scène dans des vidéos de propagande de l’EI. Dans l’une d’elles, on le voit ricanant au volant d’un pick-up qui tire des cadavres mutilés de victimes de Daesh vers une fosse commune.
Il avait été condamné par contumace à Bruxelles, au mois de juillet, à 20 ans de prison dans un procès sur les filières de recrutement de djihadistes belges pour la Syrie. “Les enquêteurs considéraient Abaaoud comme le ‘cerveau’ des attentats du 13 novembre. Il était aussi fortement soupçonné d’avoir joué un rôle dans : l’attentat avorté contre une église de Villejuif, en avril 2015 ; un projet déjoué d’attaque contre une salle de concert ; ou encore l’attaque du Thalys en août” (L’Obs).
Mais cette sinistre célébrité ne l’avait pas empêché de revenir en Europe, et vraisemblablement à deux reprises. Un téléphone qu’il utilisait avait été repéré en Grèce en janvier, au moment des attentats déjoués de la cellule de Verviers en Belgique : “Le 15 janvier, une semaine après les attentats de janvier à Paris, la police belge avait donné l’assaut dans une maison de cette ville de l’est de la Belgique, tuant deux de ses occupants, qui selon les enquêteurs s’apprêtaient à cibler les forces de l’ordre. Abaaoud n’était pas sur place. Mais début février, il revendiquait avoir ‘planifié’ ces attentats déjoués de justesse dans une interview que lui attribue Dabiq, le magazine de l’EI” (Paris Match).
“Mon nom et ma photo étaient dans tous les journaux”
Dans cet interview de propagande du magazine numérique (en anglais) de l’État islamique, il “expliquait être parvenu à se rendre en Belgique avec deux autres Belges dans le but de ‘terroriser les croisés'” (Huffington Post). “Mon nom et ma photo étaient dans tous les journaux et pourtant je suis parvenu à rester dans leur pays, à planifier des opérations contre eux et à partir sain et sauf quand cela est devenu nécessaire”, plastronnait-il.
Un “succès” confirmé par Bernard Cazeneuve lui-même : “Aucune information émanant de pays européens dans lequel il aurait pu transiter avant d’arriver en France ne nous a été communiquée suggérant qu’il ait cheminé en Europe, et soit arrivé jusqu’à la France”, a déploré le ministre français de l’Intérieur. “Ce n’est que postérieurement aux attentats de Paris qu’un service de renseignement d’un pays hors d’Europe nous a signalé avoir eu connaissance de sa présence en Grèce” (SudInfo.be).
“C’était un petit con”
Né en 1987 dans la commune bruxelloise de Molenbeek-Saint-Jean devenue un véritable nid d’islamistes au nez et à la barbe des autorités, Abdelhamid Abaaoud n’avait rien d’un enfant déshérité. Son père, commerçant, avait pignon sur rue à Molenbeek où il tenait un magasin de vêtements.
“Ses parents avaient de grandes ambitions pour le jeune Abdelhamid”, lit-on sur SudInfo.be ; ils l’avaient donc inscrit dans “l’un des établissements scolaires les plus huppés de la région bruxelloise, le collège Saint-Pierre à Uccle […] où il a fréquenté pendant quelques années les enfants des familles les plus fortunées de Bruxelles”.
Il aura d’abord fait le malheur de sa famille en se lançant dans l’escalade de la délinquance puis en entraînant son jeune frère en Syrie :
“C’était un petit con”, harcelant ses condisciples et ses professeurs ou volant des portefeuilles, a raconté un ex-camarade de classe au tabloïd populaire belge La Dernière Heure. “Abou Omar al-Baljiki avait déjà fait la une des journaux belges début 2014 après avoir emmené en Syrie son petit frère Younes, 13 ans, surnommé ‘le plus jeune djihadiste du monde’ par certains médias” (Le Point).
Voilà qui montre les limites d’un discours culpabilisant souvent entendu sur nos “banlieues déshéritées”. Si la radicalisation islamique s’enracine dans la misère, celle-ci est moins sociale que spirituelle.