L’avocat chrétien Zhang Kai a été arrêté par la police le 25 août dernier. Sa mère, sans nouvelles de lui depuis, crie sa peur et sa colère mais aussi sa fierté pour son fils.
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À Wenzhou, important port situé sur la côte sud-est de la Chine, 300 000 catholiques et 1 million de protestants environ tentent de résister à la campagne antichrétienne – abattage des croix et lieux de culte chrétiens – lancée depuis 2013 par le régime communiste.
Selon les témoignages sur place, la campagne est montée d’un cran et les arrestations se multiplient. Parmi eux, l’avocat chrétien Zhang Kai, réputé pour ses actions de défense des églises, arrêté par la police le 25 août dernier. Depuis, plus de nouvelles, seulement un document du Bureau de la sécurité publique de la capitale du Zhejiang l’accusant d’avoir “troublé l’ordre public” et “divulgué des secrets d’État”.
La lettre d’une mère désespérée
Deux mois plus tard, sa mère, désespérée, écrit une lettre ouverte à son fils, diffusée la semaine dernière par ChinaAid. Elle-même ignore où il se trouve. Basé à Pékin, il ne cessait d’aller et venir à Wenzhou pour défendre devant les tribunaux les communautés chrétiennes : “Ni moi, ni tes avocats avons la moindre idée de l’endroit où tu as été emmené, de la partie de Wenzhou tu te trouves. Que manges-tu ? Comment est l’endroit où tu te trouves ? Es-tu torturé ?”.
Les questions se bousculent dans l’esprit de cette mère qui a essayé en vain de dissuader son fils de se lancer dans un tel combat – lui, “petite goutte d’eau dans un océan”, lui disait-elle. “J’ai essayé de te convaincre de t’occuper d’affaires financières, pour te faire un peu d’argent, mais tu ne m’écoutais pas, ne prenant en charge que les cas d’interrogatoires [illégaux], avortements forcés, droits de l’homme violés, églises persécutées », lit-on dans la lettre répercutée également par Tempi.it.
“Sans les avocats, la Chine s’enfoncerait encore plus dans la corruption”
La mère du juriste raconte le jour où il a décidé que le droit était ce qu’il voulait faire. “Un jour tu m’as demandé : ‘Maman c’est quoi un avocat’. Je t’ai répondu : ‘Un homme qui fait la distinction entre ce qui est juste et ce qui ne l’est pas, qui défend les personnes légalement, selon la justice et publiquement’ ; et tu m’as répondu : “Ce métier me plaît, c’est ce que je ferai’…”
Elle se souvient de toutes ces nuits où, plus tard, Zhang Kai passait son temps à lire et à s’inquiéter pour son pays et son peuple, et elle à lui demander si son “entêtement” aurait servi à quelque chose. Il lui avait répondu : “Même impuissants et incapables de changer l’Histoire, nous pouvons pleurer avec ceux qui pleurent, souffrir avec ceux qui souffrent. Sans les avocats, la Chine s’enfoncerait encore plus dans la corruption”.
Fière de son fils, avocat jusqu’au bout
Zhang Kai était convaincu que les lois et l’état de droit pouvaient sauver la Chine de la dictature. Il prenait son métier à cœur, comme une mission : “La patrie, que j’adore profondément, comme une mère malade et souffrante, m’a appelée. Ma mission est en Chine, mon destin est lié à celui du progrès légal de la Chine”, disait-il souvent.
“Mais faut-il vraiment que tu te mettes contre le parti ?”, lui demandait sa mère. Zhang répondait : “Si un soldat sait qu’il doit aller au front pour vaincre son ennemi, n’y va-t-il pas ?”, révélant l’état d’esprit qui l’aurait conduit à se lancer dans la défense des églises de la province orientale du Zhejiang, où plus de 1 500 croix ont été démontées ou détruites et une quarantaine de lieux de culte rasée au sol en à peine deux ans.
“Mon fils, tu t’es fait courir après dans les rues de Pékin, emprisonner à Chongqing, intercepter à Guizhou, arrêter pour la seconde fois à Wenzhou. Durant toutes ces tribulations, j’ai toujours eu très peur”, lui avoue sa mère.
Une mère “consumée par la peur”
La mère de Zhang “est consumée par la peur”, dit-elle. Peur probablement que son fils subisse le même sort que des dizaines d’autres de ses confrères, comme l’avocat Gao Zhisheng, l’un des plus importants dissidents chinois, surnommé “la conscience de la Chine”, libéré en août 2014, après cinq années de calvaire entre tortures et trois années consécutives d’isolement. Lui aussi avait “disparu” en 2009 suite à ses activités de défense des églises.
La lettre se termine sur un plaidoyer et une prière : “Les leaders de Chine ne peuvent répéter sans cesse des choses qu’ils ne feront pas. Ils ne peuvent permettre que les personnes qui agissent selon la loi soient opprimées et jetées en prison. Un tel gouvernement ne peut tenir longtemps ! Mon fils, que Dieu soit avec toi et que Jésus Christ te protège”.