Le cheikh Khaled Bentounès, 66 ans, chef spirituel musulman soufi, est un ardent promoteur du rapprochement intercommunautaire. De passage à l’Unesco fin septembre, le sage algérien a accordé une interview exclusive à Aleteia.
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Aleteia : Vous êtes musulman soufi. Quelle définition donneriez-vous du soufisme à un chrétien ?
Cheikh Khaled Bentounès : Le soufisme est l’islam spirituel. Le prophète Mohamed, en recevant les messages de Dieu, avait un corps et un cœur. Le corps est la lettre : des textes, des lois, des dogmes. Ces lois ont un sens, un intérieur qui est la spiritualité. Elle vient nourrir et élever l’homme. Un corps sans âme est inerte et ne sert à rien. Le soufisme est le cœur de l’islam, ce qui donne sens à nos prières et nous mène vers l’amour.
Face à tous ces clivages entre les hommes, qu’ils soient politiques, culturels ou religieux, un rapprochement entre les êtres humains est-il seulement envisageable ?
Dans notre monde en pleine mutation, il est urgent de créer du lien. Le changement auquel nous sommes confrontés semble inquiétant pour beaucoup. Sachons tirer des leçons du passé en ne perdant pas de vue cet objectif : que pouvons-nous apporter de positif à l’humanité ?
Dieu nous a fait confiance en nous créant : sommes-nous dignes de cette confiance et de ce souffle de l’Esprit qu’Il nous a confié ? Si Dieu est Un, la famille humaine ne peut alors être qu’une ! La Torah, la Bible, le Coran nous parlent tous d’Adam et Ève comme étant les prototypes du père et la mère de l’humanité, le couple dont est né la multitude des êtres humains dans leur différence de couleurs, de cultures, de traditions… Réussir à voir en l’autre une partie de nous-même, parce que nous faisons tous deux partie de la famille humaine, fera tomber de nombreux voiles et de nombreux tabous.
Cette fraternité humaine que vous appelez de vos vœux ne peut-elle être atteinte qu’au niveau spirituel ?
C’est en tout cas ce à quoi nous invitent les spirituels. Le spirituel n’est pas déconnecté du réel. Il est au contraire ce qui permet de nous renforcer dans notre vie quotidienne : comment regarder l’autre, comment l’inviter à être présent dans notre vie sans qu’il soit pour nous un problème, etc.
Quelle différence faites-vous entre l’islam spirituel, qui était une partie de l’intitulé du colloque organisé à l’Unesco à la fin du mois de septembre, et l’islam tel qu’on l’entend traditionnellement ?
Ce n’est pas traditionnellement justement, mais idéologiquement ! Le problème est là. Nous sommes face à deux réalités : une première politique et idéologique, et une autre spirituelle. C’est cette dernière qui se rattache à l’essence du message universel. Mais elle est peu connue du grand public et, malheureusement, des musulmans eux-mêmes. Découvrez la suite dès demain sur Aleteia
Propos recueillis par Mathilde Rambaud
Retrouvez la deuxième partie de l’entretien ici : “La perspective commune de toutes les spiritualités est de relier l’homme à Dieu”
Et la dernière là : « Nous avons la chance d’avoir un Pape provocateur qui nous encourage à aller de l’avant »