Elles se logent au creux des copies des candidats, enjolivant les journées parfois ternes des correcteurs. Aleteia est parti à leur recherche.
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"Qui n’a pas peiné sur 140 copies à corriger ne peut pas comprendre la valeur d’une perle", assure Pierre Timothée, professeur de philosophie et correcteur. La perle est un objet rafraîchissant qui apporte un moment de joie pure au milieu d’une copie médiocre, une friche de gribouillages, d’écriture obscure et de concepts embrouillés. Son studio parisien, perché sous un toit de zinc ployant sous la canicule, encombré de livres, a été le laboratoire de belles découvertes. Mais attention, "n’importe quelle ânerie ne peut pas être qualifiée de perle", précise-t-il, et en bon philosophe, il organise ses trouvailles par catégories. Il les pioche dans ses propres copies, celles de quelques collègues et en glane sur Internet (Virgin radio, Terrafemina).
La bêtise crasse
La perle bête est la plus commune selon Pierre Timothée, elle suppose une immense ignorance. L’élève qui a écrit par exemple "‘Cogito ergo sum’, comme disait Aristote", comme première phrase de sa copie appartient à cette catégorie. On en trouve d’assez belles comme : "Les bombes atomiques sont inoffensives quand elles servent à produire de l’électricité" ou : "La culotte glacière fond et fait dévier les ours polaires". Ces perles ont l’avantage d’être grosses, voire énormes, mais elles ont rarement l’éclat des suivantes, sauf peut-être celle-ci, en particulier grâce au commentaire qui y est accolé : "Aux États-Unis, on ne voit pas pourquoi leur 14 juillet tombe le 4 juillet. Preuve qu’ils veulent toujours se faire remarquer".
La perle maligne
Il arrive aussi, continue notre philosophe, qu’un élève conscient de son ignorance biaise d’une façon qu’il croit très subtile. Notre professeur de philosophie a ainsi lu dans l’une de ses copies : "Freud a écrit son œuvre avant 1920 et après 1920", pas de risque de se tromper ! Une autre, tout aussi futée : "Voltaire disait : ‘L’art de la citation est l’art de ceux qui ne savent pas réfléchir par eux-mêmes’, par conséquent, je n’utiliserai aucune citation". Enfin, celle-ci un peu désabusée : "Après une visite à une expo d’art contemporain, j’ai changé ma perception de la vie car j’ai compris que l’on pouvait gagner de l’argent avec n’importe quoi".
La perle qui vient d’un autre monde
Nous approchons maintenant du Graal des perles, elles nous font pénétrer dans un univers fantastique, à savoir le cerveau d’un lycéen qui pallie les manques créés par son ignorance avec une imagination fantastique. Celui qui a écrit : "Les pays pauvres se sont quasiment tous rassemblés en Afrique. Ils auraient plutôt dû se rapprocher des États-Unis, comme l’ont fait le Mexique et le Canada", nous dévoile un monde magique, où la tectonique des plaques est soumise au bon vouloir des pays. Même effet de plongée avec celle-ci : "Le mur du son est dépassé ; maintenant on peut écouter des films et de la musique dans les avions".
La Perle des perles
Mais pour qu’une bêtise accède au statut de Perle parmi les perles, Pierre Timothée exige qu’elle ait un double sens, réalise un vrai jeu de mots, à l’insu de l’élève. Pas question d’accepter les élèves qui sabotent volontairement leur devoir ! "Les femmes sont plus touchées par le chômage que par les hommes", ou "La capitale de Taïwan est Médine" (parce que "Made In Taïwan") entrent dans ce club très fermé !