L’Assemblée nationale adopté hier soir le projet de loi sur le renseignement censée améliorer la surveillance sur Internet. Rarement un texte n’aura été autant critiqué par la société civile.
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L’adoption s’est faite discrètement et en petit comité mercredi soir : seuls 30 députés étaient présents dans l’hémicycle pour valider le projet de loi sur le renseignement débattue depuis lundi. Pourtant, de nombreuses voix se sont élevées : que ce soit la Ligue des droits de l’homme, Amnesty International, Reporter sans frontières ou encore le Conseil national du numérique, tous se sont opposés à une loi qu’ils jugent liberticide.
C’est en particulier l’article 2 qui inquiète les observateurs de tous bords. Le texte prévoit en effet l’installation d’un algorithme, plus communément appelé « boîte noire », chez les fournisseurs d’accès (Orange, Free, Bouygues, SFR…) ou chez les hébergeurs de données Internet (par exemple OVH, entreprise française n°1 européen du secteur). L’objectif principal est de pouvoir épier de fond en comble les communications des internautes pour identifier d’éventuels comportements suspects en ligne. Si certaines activités de navigation semblent douteuses – mots-clés tapés ou sites Internet visités – la connexion sera automatiquement détectée et le Groupement interministériel de contrôle (GIC) pourra demander au fournisseur d’accès l’identité de l’internaute, afin d’ouvrir une enquête.
« 1984, en vrai »
Pour l’entrepreneur du Web et membre du conseil national du numérique, Tristan Nitot, cette loi est inacceptable : « Ces boîtes noires, ce sont des espions chargés de détecter les mouvements suspects, a-t-il estimé ce mardi au micro de Jean-Jacques Bourdin sur RMC. Si je vais sur la page « djihad » de Wikipédia parce que je fais un exposé pour l’école ou que je veux en parler à mes enfants, est-ce que je fais un mouvement suspect ? », se demande-t-il. L’entrepreneur va même plus loin. Selon lui, l’Assemblée a voté « ce qui va faire de la France un 1984 (le roman de Georges Orwell, ndlr) en vrai, et tout le monde s’en moque ! ».
Tristant Nitot n’est pas le seul à s’inquiéter du caractère excessif de cette loi. Le mouvement politique Sens commun lui aussi estime que ce texte contient un aspect « anti-démocratique» qui « porte atteinte aux libertés fondamentales et présente le risque très sérieux d’une surveillance de masse, sans contrôle réel et indépendant ». Ses responsables s’interrogent même sur l’utilité d’une telle mesure : « Face à des pirates qui ont déjà montré leur expertise informatique, cette mesure peut-elle seulement être efficace ? ». Les journalistes, les avocats et les parlementaires devraient être protégés par le projet de loi. Mais, pour le moment, les modalités de cette protection n’ont pas été présentées.