Une visite pastorale et, surtout, politique. Pour son 4e déplacement officiel en France, du 25 au 28 avril, le patriarche maronite d’Antioche et de tout l’Orient, sera reçu par François Hollande et s’adressera à l’Unesco.
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C’est un véritable marathon qui attend Sa Béatitude Mgr Bechara Boutros Raï pendant les quatre jours qu’il passera à Paris, du samedi 25 au mardi 28 avril. Venu avant tout pour inaugurer le premier siège de l’Éparchie maronite de Paris, ce déplacement, dans le contexte actuel, revêt « une signification particulière » souligne Mgr Nasser Gemayel, évêque de l’Éparchie Notre-Dame du Liban de Paris des maronites.
« La situation politique des chrétiens au Moyen-Orient est dramatique comme jamais auparavant. Ils sont persécutés et obligés de fuir, leur patrimoine est détruit. Une nouvelle carte géopolitique semble se dessiner actuellement au Moyen-Orient et celui-ci ne doit pas se voir vidé d’une de ses composantes originelles », prévient le prélat. Présents depuis 2 000 ans sur ces territoires, « les chrétiens d’Orient ont vécu pratiquement sous tous les régimes et tous les peuples même musulmans, explique Mgr Gemayel. Pourquoi tout cela ? Qu’ont fait les chrétiens pour mériter un tel sort ? Pourquoi s’acharne-t-on à les éloigner ainsi de l’Orient ? »
Les chrétiens d’Orient, un pont entre l’islam et l’Occident
Au-delà d’une visite pastorale et de temps forts spirituels passés auprès de la communauté maronite de France (messe d’action de grâce à la cathédrale Notre-Dame du Liban, inauguration de la nouvelle Éparchie, catéchèse, visite au siège de la Conférence des évêques de France, vernissage de l’exposition « Présence maronite en France », lancement des journées culturelles de Beit Maroun à Meudon, etc.), c’est bien un déplacement politique que va accomplir le cardinal Raï, qui sera d’ailleurs accueilli comme un chef d’État par la présidence de la République : une rencontre officielle avec François Hollande est prévue lundi après-midi à l’Élysée.
Au cours de cet entretien, il est prévu que le cardinal évoque la situation dramatique des chrétiens d’Orient : « Les relations entre l’Église maronite et la France sont séculaires. Le cardinal Raï vient remplir une mission d’avant-garde afin de convaincre le président de la République de l’importance de la défense des chrétiens d’Orient ». « La question est la suivante, poursuit-il : peut-on imaginer un Orient sans chrétiens ? Comment l’Église universelle, qui prêche le dialogue œcuménique et interreligieux, peut-elle l’imaginer ? Les chrétiens, au Moyen-Orient, sont un pont entre l’islam et l’Occident. S’ils disparaissent, qui va remplir ce rôle ? L’Occident va se retrouver nez à nez avec l’islam, prévient l’évêque. Les chrétiens d’Orient aident l’Europe dans ses relations avec le monde islamique depuis 1 400 ans ! » Le sujet de la conférence de Mgr Raï à l’Unesco, samedi 25 avril, portera d’ailleurs sur « la présence chrétienne au Moyen-Orient et son rôle dans la promotion de la culture de la paix ».
Une part musulmane dans chaque chrétien libanais
« Nous avons les mêmes habitudes, ajoute Mgr Gemayel. Le Liban est un pays modèle. Il y a dans chaque chrétien libanais une partie musulmane et dans chaque musulman libanais une partie chrétienne. S’il n’y a plus qu’une composante en Orient, cela va poser un problème capital. En ce sens, le message que porte le cardinal Raï est primordial. » Concernant la position de la France vis-à-vis de Bachar el-Assad, qui voit en Damas un ennemi de la liberté et non un allié dans la lutte face au pseudo État islamique, le patriarche d’Antioche et de tout l’Orient ne reviendra a priori pas sur ses déclarations qui avaient grand bruit en 2012 quand il avait pris publiquement la défense du régime syrien face à Daesh. « Le cardinal Raï ne fait que son travail de défense et de sauvegarde des chrétiens opprimés, loin de toute rancœur politique. » Si aucune rencontre officielle particulière n’est prévue avec les autorités musulmanes de France, Mgr Gemayel assure que « beaucoup d’amis musulmans seront présents et fêteront avec les chrétiens maronites l’inauguration de l’Éparchie. Des rencontres et des dîners privés sont d’ailleurs prévus », confie-t-il.