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Évangile de dimanche : les tentations de Jésus

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aleteia - publié le 22/02/15
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Marc 1, 12-15

En ce temps-là, Jésus venait d’être baptisé
12 Aussitôt l’Esprit le pousse au désert
13 et, dans le désert, il resta quarante jours, tenté par Satan. Il vivait parmi les bêtes sauvages, et les anges le servaient.
14 Après l’arrestation de Jean, Jésus partit pour la Galilée proclamer l’Évangile de Dieu ;
15 il disait : « Les temps sont accomplis : le règne de Dieu est tout proche. Convertissez-vous et croyez à l’Évangile. »

Chaque année, le premier dimanche de Carême, nous lisons le récit des tentations chez l’un des trois évangélistes synoptiques. Cette année, nous les lisons dans Saint-Marc, c’est-à-dire dans la version la plus discrète possible : « Jésus venait d’être baptisé. Aussitôt, l’Esprit le pousse au désert. Et dans le désert il resta quarante jours, tenté par Satan. Il vivait parmi les bêtes sauvages et les anges le servaient ».

Marc ne nous précise pas quelles tentations Jésus a dû affronter, mais la suite de son Évangile nous permet de les deviner : ce sont toutes les fois où Il a dû dire non ; parce que les pensées de Dieu ne sont pas celles des hommes, et que, homme Lui-même, Il était entouré d’hommes, Il a dû faire sans cesse le choix de la fidélité à son Père.

L’épisode qui nous vient tout de suite à l’esprit, c’est ce qui s’est passé près de Césarée de Philippe : « En chemin, Jésus interrogeait ses disciples : Qui suis-je, au dire des hommes ? Ils lui dirent Jean le Baptiste ; pour d’autres, Élie ; pour d’autres, l’un des prophètes. Et lui leur demandait : Et vous, qui dites-vous que je suis ? Prenant la parole, Pierre lui répond : Tu es le Christ. Alors il leur commanda sévèrement de ne parler de lui à personne » (Mc 8, 27-30).

Cette sévérité même est certainement déjà signe d’un combat intérieur. Et tout de suite après, Marc enchaîne : « Il commença à leur enseigner qu’il fallait que le Fils de l’Homme souffre beaucoup, qu’il soit rejeté par les anciens, les grands prêtres et les scribes, qu’il soit mis à mort et que, trois jours après, il ressuscite ». Ce qui, évidemment, cadrait mal avec le titre glorieux qui venait de Lui être décerné par Pierre. Et vous connaissez la suite : « Pierre, le tirant à part, se mit à le réprimander. Mais lui, se retournant et voyant ses disciples, réprimanda Pierre ; il lui dit : Retire-toi ! Derrière moi, Satan, car tes vues ne sont pas celles de Dieu mais celles des hommes ». Il y a là, dans la bouche de Jésus l’aveu de ce qui fut la plus forte peut-être des tentations : celle d’échapper aux conséquences tragiques de l’annonce de l’Évangile.

Tentation terriblement subtile : car elle s’accommode parfaitement bien d’un beau discours ; c’est au moment même où Pierre vient de faire la plus belle déclaration, le plus bel examen de théologie (!), qu’il est pour le Christ occasion de tentation.

Jusqu’à la dernière minute, à Gethsémani, Il aura la tentation de reculer devant la souffrance : « Mon âme est triste à en mourir… Père, à toi tout est possible, écarte de moi cette coupe ! Pourtant, non pas ce que je veux, mais ce que tu veux ! » (Mc 14, 34-36). Il est bien clair ici que sa volonté doit faire effort pour s’accorder à celle de son Père.

Jésus a eu certainement, on vient de le voir, la tentation de ne pas souffrir ; Il a connu aussi celle de réussir ; là encore, son entourage L’y poussait ; le succès pouvait bien devenir un piège : « Tout le monde te cherche » (Mc 1, 37), Lui disaient ses disciples à Capharnaüm ; je vous rappelle le contexte ; le matin du sabbat à la synagogue, d’abord, où Il avait délivré un possédé, puis la journée au calme chez Simon et André, où Il avait guéri la belle-mère de Pierre ; le soir tous les alentours étaient là, qui avec son malade, qui avec son possédé ; et Il avait guéri de nombreux malades ; la nuit suivante, avant l’aube, II était sorti à l’écart pour prier ; déception à la maison quand le jour s’était levé : s’Il était parti ?

« Tout le monde te cherche… » Il avait dû s’arracher : « Allons ailleurs dans les bourgs voisins, pour que j’y proclame aussi l’Évangile : car c’est pour cela que je suis sorti » (Mc 1, 38). Pour cela et pas pour autre chose… Elle est là, la tentation : se laisser détourner de sa mission.

Le choix de la fidélité

Cela a commencé très tôt, certainement, quand il a fallu affronter les moqueries de quelques proches ; toute vocation au service des autres impose des arrachements ; sa propre famille a parfois été un obstacle à sa mission : « Les gens de sa parenté vinrent pour s’emparer de lui. Car ils disaient il a perdu la tête » (Mc 3, 21).

Cette souffrance de l’incompréhension traduit une autre sorte de tentation, celle de convaincre par des actes spectaculaires : « Les Pharisiens vinrent et se mirent à discuter avec Jésus ; pour lui tendre un piège, ils lui demandent un signe qui vienne du ciel. Poussant un profond soupir, Jésus dit : Pourquoi cette génération demande-t-elle un signe ? En vérité, je vous le déclare, il ne sera pas donné de signe à cette génération… Et les quittant, il remonta dans la barque et il partit sur l’autre rive » (Mc 8,11-12). Très certainement, quand Jésus décide brusquement de fausser compagnie à ses interlocuteurs du moment, que ce soient ses amis ou ses adversaires, c’est qu’Il a un choix à faire.

Ce choix est celui de la fidélité à sa mission : qu’Il soit le Messie, tout le monde y pense depuis le début ; mais le problème c’est qu’une fois encore, les pensées de Dieu ne sont pas les nôtres ; par exemple, on attendait, on espérait un Messie politiquement puissant, qui chasserait l’occupant romain et restaurerait la liberté politique d’Israël ; Jésus a dû sans cesse prêcher la seule grandeur de l’amour ; c’est pour cela qu’à plusieurs reprises, Il impose le secret à ceux qui ont entrevu son mystère (que ce soit à la Transfiguration ou ailleurs) : Il ne veut pas laisser son entourage s’engager sur une fausse piste.

On ne s’étonne pas non plus qu’Il ait vécu paisiblement au désert pendant 40 jours – chiffre symbolique – au milieu des bêtes sauvages : car c’est bien ainsi que le prophète Isaïe avait défini l’harmonie qui règnera dans la création nouvelle : « Le loup habitera avec l’agneau, le léopard se couchera près du chevreau » (Is 11). Marc nous dit ici : Jésus est l’homme véritablement libre par rapport à toutes les tentations, le premier-né de l’humanité nouvelle.

Marie-Noëlle Thabut (L’intelligence des Écritures – Éd. Artège)

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