Deux normaliens, époux chrétiens, explorent le mystère du mariage sacramentel avec l’éclairage supérieur de la foi. Un ouvrage dense, brûlant, lumineux !
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Ils sont tous les deux anciens élèves de l’École normale supérieure, chose rare dans un couple, lui, journaliste, elle, enseignante. Chose plus rare encore, ils sont de fervents chrétiens et parents de six enfants, ce qui les met tout à fait hors norme. Et ils ont mobilisé leur intelligence, leur culture, leur foi, et leur expérience d’époux et de parents, dans L’amour sauvé, un livre d’une rare élévation « à l’intérieur d’un réalisme extraordinaire », comme le souligne Mgr de Dinechin, le préfacier. Il existe en effet une foultitude de bons écrits sur le mariage, allant du témoignage et du conseil psychologique à la théologie morale ou fondamentale, mais peu empruntent aussi résolument « la voie d’en haut ». Y compris pour parler de la vie commune et de l’union des corps, car l’angélisme n’a pas sa place dans la vie conjugale.
Un sacrement pour deux…
De tous les sacrements, le mariage est à la fois l’un des plus communs et l’un des plus difficiles à comprendre. N’est-il pas le seul à concerner deux personnes à la fois, de sexes différents (la précision, aujourd’hui, n’est pas superflue !), unies corps et âmes jusqu’à ce que la mort les sépare ? Un sacrement pour deux, un homme et une femme, afin qu’ils fassent « une seule chair » jusqu’à ce que la mort les sépare… Autant se munir du plus puissant des projecteurs pour y voir clair dans cet embrouillamini qui a donné tant de sueurs froides aux théologiens depuis les premiers siècles de l’Église (de fait, alors que saint Paul avait déjà tout dit, ils ont mis plus de mille ans avant d’avoir la certitude qu’il s’agissait bien d’un sacrement – le 7e parce que le dernier défini).
La lumière, c’est le Christ. Or ici elle éclaire et sauve de son rayonnement bienfaisant ce que les théologiens avaient le plus de mal à tenir pour sauvable : l’union sexuelle, que nombre d’entre eux, et non des moindres, jugeaient fatalement entachée de péché. Pourtant, saint Paul déjà le proclamait : « Ce mystère est grand ! ». Mais quel est-il donc, ce mystère ? Jean-Claude et Yolande Bésida y répondent tout au long de cet essai en explorant sous toutes ses coutures « la voie heureuse et sainte » du mariage. Mais s’il fallait répondre d’une phrase, citons celle-ci : « Le conjoint est l’autre, qui est offert comme chemin vers le Tout Autre ». L’essentiel est dit.
Non aux « tactiques de l’évitement » !
De même qu’il n’y a rien d’impur pour les purs, il n’y pas non plus de sujets tabous. On pense ici aux fameux versets de l’épître de saint Paul aux Éphésiens demandant à l’épouse d’être « soumise » à son mari « en toutes choses », et à celui-ci d’aimer sa femme « comme le Christ a aimé l’Église » (Ep. 5, 21-30).
Les prédicateurs d’aujourd’hui s’accommodent volontiers de commenter la part échue à l’homme (d’autant plus facilement qu’eux-mêmes sont célibataires…), mais la plupart évitent prudemment d’insister sur cette « soumission en toutes choses » qui leur vaudrait immanquablement des commentaires acerbes de fidèles du beau sexe. Les Bésida, eux, n’ont pas cette fausse pudeur et récusent fermement ces « tactiques de l’évitement » dont on s’excuse généralement « en excipant que c’est un élément culturel typique d’une société patriarcale, et qu’il ne saurait pas inspirer une conscience chrétienne moderne ». Mais, objectent-ils, « si l’on commence par évacuer de l’Écriture tout ce qui est âpre, où s’arrêter ? » Saint Paul, insistent-ils, est ici dans le registre « de la prescription instante », signe que « quelque chose d’important est en jeu », aujourd’hui comme il y a 2 000 ans.
Aux rives du mystère
Quand on est en haute altitude, on respire un air dont la pureté paraît brûlante. C’est bien l’impression que ressent le lecteur : l’envie de lire par petites bribes, en se retenant d’inspirer à pleins poumons pour ne pas les brûler avec cet oxygène pur. Ce n’est que peu à peu, en progressant, qu’on se risque aux inspirations profondes. Suivons nos guides pas à pas dans l’ascension :
« "Proles, fides, sacramentum", disait saint Augustin des biens du mariage, dans une progression géniale du plus visible et commun au plus intérieur et spécifique : "descendance", "alliance", "mystère". » La marche devient facile : l’intelligence s’est acclimatée, le cœur s’est décrassé. Nous touchons aux rives du mystère : cet humble livre sur le mariage nous introduit dans la chambre du Roi.
L’amour sauvé – Mystère du mariage, par Jean-Claude et Yolande Bésida, Ad Solem, 190 pages, 21 €.