Dans sa dernière chronique sur l’antenne de radio Espérance, Guillaume de Prémare revient sur les débats du synode sur la famille.
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Un vieux confesseur plein de sagesse me disait il y a quelques semaines : « Ce n’est pas la loi qui change le bonhomme, c’est l’amour. La loi, ce sont des balises sur le chemin de l’amour. » Cela me fait penser à ces cairns – ces petits tas de pierraille – qui balisent les sentiers de montagne. Dans les passages les plus périlleux, les plus abrupts, il arrive aussi que la roche soit équipée d’une main courante pour nous éviter de sombrer dans l’abîme. Il est clair que ce qui met en chemin le bonhomme en montagne, ce n’est pas le plaisir de rencontrer des cairns et des mains courantes, c’est la soif du sommet.
La question n’est donc pas de savoir s’il faut choisir entre la loi et l’amour. La question est d’exprimer la loi fondamentale d’amour. Cette loi fondamentale, c’est le don : là où est le don, là est l’amour. Le don n’est pas une loi essentiellement religieuse, c’est une loi anthropologique : c’est dans le don que l’amour naît et s’épanouit. Le don est la loi naturelle d’amour. Ce don est le principe même de la famille, réalité naturelle qui reçoit, transmet et diffuse l’art d’aimer.
Le mariage chrétien témoigne par excellence de cette loi naturelle d’amour. Cela ne signifie pas que le mariage non chrétien ne soit pas un signe du don. Mais le mariage chrétien est le mariage naturel porté à sa perfection selon le plan originel de Dieu. Voilà le témoignage que le couple chrétien, la famille chrétienne, les enfants chrétiens, sont appelés à porter.
Le synode sur la famille revient pour un an dans les diocèses, avant de repartir à Rome. Le moment est venu pour les familles chrétiennes de se saisir avec enthousiasme de ce synode. Pendant ces quinze jours romains, la dimension du synode a été principalement cléricale. Les clercs ont beaucoup réfléchi par rapport à leur propre mission, ce qui est bien naturel. Mais l’Eglise ne peut rester ainsi centrée sur elle-même, sur ses propres lois, sur ses procédures canoniques, sur ses questionnements théologiques, sur ses systèmes pastoraux.
Je le dis nettement : l’Eglise ne sortira pas d’elle-même pour rejoindre les périphéries si son approche demeure trop cléricale. De l’extérieur, les observateurs ont vu, pendant quinze, jours, une Eglise assez préoccupée de ses problèmes internes. Je ne dis pas qu’ils ne doivent pas être abordés, mais je veux avertir que les problèmes de l’Eglise ne sont pas ceux du monde.
Le principal problème du monde est qu’il oublie la loi naturelle d’amour, loi qui n’est pas seulement pour les chrétiens, mais pout tous les hommes. Il n’y a pas de meilleure manière de rejoindre le monde que de parler d’amour. Il n’y a pas de meilleure manière de parler d’amour que de parler de don.
J’ajoute que nul n’est plus qualifié pour témoigner du don du mariage que celui qui en vit. C’est pourquoi les couples chrétiens, les familles chrétiennes, les enfants chrétiens, apporteraient beaucoup au monde et à l’Eglise en se saisissant de ce synode pour en quelque sorte le "décléricaliser" et en élargir les perspectives – en son contenu, sa tonalité et son langage -, pour lui donner une dimension "charnelle" qui rejoigne les véritables misères d’un monde où l’amour est blessé et ne demande qu’à guérir.
Chronique Radio Espérance du 24 octobre 2014