Aimer son pays ne requiert aucune justification. Qui a jamais demandé à quiconque raison de l’amour qu’il porte à sa mère ?
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Un pays, c’est une réalité politique, historique, géographique, démographique et culturelle. Cette alchimie constitue une substance charnelle et spirituelle – le corps et l’âme – où s’enracine une mystique. Cette mystique est toujours au-delà et en deçà du réel mais elle porte une promesse qui est l’énergie vitale du pays. Cette énergie se déploie par amour, ou alors elle meurt.
Pays d’ancienne unité et de lente construction, pays d’enracinement, de culture, de rayonnement et d’aventure spirituelle, la France porte par excellence cette mystique. Tous les pays ne la portent pas de la même manière ni au même degré, certains cherchent encore la sève commune. Français, nous avons reçu cette sève, nous la faisons vivre et elle nous fait vivre. Je dirais que la patrie charnelle de Péguy est la permanence d’une France qui veut vivre, et qui veut vivre comme France.
La vie convoque l’amour
Vivre la France comme une âme, une poésie, une personne, une mère, jusqu’à la sertir au cœur de son âme amoureuse, voilà une belle charité. Mais n’oublions pas que la vocation de cette charité est de s’exercer – in fine – envers des hommes et des femmes. Aimer la France dépasse l’abstraction, ou alors elle devient idéologie, idolâtrie. Aimer la France, c’est aussi aimer son peuple, ou plutôt aimer « ses peuples de France », comme on disait jadis.
La France se conjugue au singulier et au pluriel : un peuple et des peuples ; un pays et des pays ; une langue et des langues ; une culture et des cultures ; une tradition et des traditions ; un tempérament et des tempéraments. De l’Artois en Provence, du Pays de Bray au Rouergue, du Trégor aux Antilles et jusqu’aux antipodes du vaste monde, la France n’est pas une nation-ethnie. Son extraordinaire capacité d’acculturation l’atteste.
Le trésor de l’universel
La France porte en son écrin millénaire le trésor de l’universalité française. C’est le mystère particulier de la France, cette mystique qui la fait aimer par des frères de tous les continents, des frères et des amis qui attendent de la France qu’elle soit elle-même, qui la chérissent et l’appellent, parfois avec angoisse, toujours avec tendresse.
Avons-nous au cœur cet humble petit surplus d’orgueil français qui est comme l’aiguillon de notre responsabilité ? Est-il un Français qui porte amoureusement en son cœur l’âme du pays et qui soit indifférent à ses tourments et démissions du moment ? Allons-nous reprendre conscience de ce que nous sommes ?
Qu’il s’agisse de l’intérieur ou de l’extérieur, soyons vigoureusement Français et nous nous ferons aimer de l’étranger, parce qu’aucun pays au monde n’a reçu autant de talents, de force d’âme, de finesse et de redoutable habileté pour faire de chaque peuplade – ou presque – un frère, un ami, ou à défaut un allié.
Le monde a besoin de la France. Non pour le soumettre mais pour le servir, le protéger des prédations mais aussi de lui-même, adoucir ses mœurs les plus rudes, l’éclairer, l’éduquer, le faire grandir. En un mot l’aimer.