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Europe : l’Eglise au chevet de la construction européenne

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Philippe Oswald - publié le 12/05/14
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Pour la hiérarchie de l’Eglise, l’Europe est gravement malade, mais il n’est pas question de l’euthanasier. Il faut lui rendre son âme pour servir les nations et ranimer l'espérance des peuples.

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12/05/2014

La campagne pour les élections européennes s’ouvre ce 12 mai.  Les scrutins auront lieu du 22 au 25 mai dans les 28 états membres de l’Union européenne (le 25 mai en France). 500 millions d’Européens auront à choisir leurs 751 représentants (74 pour la France) au Parlement européen pour les cinq prochaines années.
L’enjeu de ces élections est lourd au regard du bien commun de l’Europe, tant du point vue éthique qu’économique. Mais la complexité du dispositif européen, son éloignement apparent des préoccupations des citoyens, et plus encore les maux qui sont attribués à tort ou à raison aux instances européennes, laissent augurer un nouveau record d’abstentions.
Les catholiques sont parfois les premiers à critiquer l’Europe comme si elle était responsable de tous les maux, non seulement économiques, mais dans le domaine moral et familial. Le fait est que c’est plus que jamais à Strasbourg et à Bruxelles que se décide l’avenir du « vieux continent ». Il faut donc s’intéresser de près à ce qui s’y passe et se demander comment agir positivement pour que le projet fondateur des « pères de l’Europe » puisse être remis sur les rails plutôt que de contribuer à son déraillement.

Face à « l’apostasie de l’Europe » 
La hiérarchie de l’Eglise catholique non seulement entend et partage nombre des critiques adressées à l’Europe, mais c’est elle qui a dressé le constat le plus sévère en dénonçant, par la voix de Benoît XVI,  son « apostasie ». C’était au cours d’un colloque organisé par la COMECE  le 24 mars 2007 à Rome : «  N’est-il pas surprenant, remarquait le Pape, que l’Europe d’aujourd’hui, tandis qu’elle vise à se présenter comme une communauté de valeurs, semble toujours plus souvent contester le fait qu’il existe des valeurs universelles et absolues. Cette forme singulière d’ “apostasie” d’elle-même, avant même que de Dieu, ne la pousse-t-elle pas à douter de sa propre identité ? De cette façon, on finit par répandre la conviction selon laquelle la “pondération des biens” est l’unique voie pour le discernement moral et que le bien commun est synonyme de compromis. En réalité, si le compromis peut constituer un équilibre légitime d’intérêts particuliers différents, il se transforme en mal commun chaque fois qu’il comporte des accords qui nuisent à la nature de l’homme. »
Lorsque l’Europe nie l’existence de « valeurs universelles et absolues », elle tombe dans l’utilitarisme, le matérialisme, et  se renie elle-même. Comment déplorer la montée de l’intolérance, du racisme, du nationalisme exacerbé, si l’on tourne le dos à l’existence même de la nature humaine, et donc à l’existence d’un bien objectif et à la possibilité même d’une fraternité ?

L’Eglise continue de soutenir la construction européenne
L’Eglise regarde le mal avec lucidité, sans jamais perdre l’espérance. C’est pourquoi elle continue de défendre la construction européenne, ne voulant pas que l’on jette le bébé avec l’eau du bain. Le bébé,  en l’occurrence, c’est  cette « fraternité chrétienne » que l’un des pères fondateurs de l’Europe, Robert Schuman, voulait qu’elle retrouvât pour renaître au lendemain de la Seconde Guerre mondiale qui l’avait mise en lambeaux. Cette fraternité s’enracine  dans ces valeurs énumérées par Jean Paul II : « …affirmation de la dignité transcendante de la personne, de la valeur de la raison, de la liberté, de la démocratie, de l’état de droit et la distinction entre politique et religion » (Jean-Paul II, Exhortation apostolique post synodale Ecclesia in Europa, 28 juin 2003, n°109). Le fait est que l’érosion et la dilution de ces valeurs menacent directement la fraternité non seulement entre les peuples mais au sein de chaque nation.
 

Il ne s’agit pas d’agiter nos racines chrétiennes comme un chiffon rouge sous le nez des athées, mais de rappeler que la culture occidentale, grâce à son double héritage gréco-romain et, plus encore, judéo-chrétien, a élaboré une anthropologie à vocation universelle, devenue, en effet, peu ou prou, un point de repère pour le monde entier. L’actuelle mobilisation pour sauver les jeunes nigérianes enlevées par Boko Haram, l’indignation mondiale que provoque ce rapt barbare, manifeste que certaines valeurs chrétiennes telles que le respect de la personne humaine, de la femme, de l’enfant, de la liberté, ont désormais droit de cité sur la majeure partie de la planète – au grand dam, précisément, des islamistes pour lesquelles « l’éducation occidentale est un péché » (ce serait approximativement la signification de « boko haram » en langue haoussa). 

Le grand paradoxe contemporain des droits de l’homme
Le paradoxe est que les Occidentaux et particulièrement les Européens, ou du moins leurs élites, tout en se faisant les hérauts des droits de l’homme et en proclamant imprescriptibles les crimes contre l’humanité, n’ont plus l’air de bien savoir ce qu’est un homme. Trop d’entre eux donnent même l’impression qu’ils ne veulent plus le savoir, afin de promouvoir une identité humaine à géométrie variable, révisable au gré de l’opinion ou plutôt des faiseurs d’opinion. C’est ainsi qu’après avoir légalisé l’avortement à titre d’exception, ils l’ont fait passer pour un droit au mépris de la vie des êtres humains les plus faibles ; puis ils se sont attaqués à l’identité et à la différence sexuelle dans l’éducation et dans le mariage ; enfin, ils ont engagé et déjà gagné dans plusieurs pays d’Europe la bataille pour la légalisation de l’euthanasie.  
Aussi, la question qui se pose aujourd’hui au niveau de l’Europe n’est pas d’abord celle de l’économie et du rôle de l’euro, aussi importants que soient en effet ces problèmes économiques et financiers au demeurant des plus complexes. Mais l’économie est une servante, pas un maître, sinon elle devient, comme l’argent et par lui, un tyran.

L’Europe, au service de quelle humanité ?
Pour l’Eglise, la question que soulève plus que jamais aujourd’hui la construction européenne est celle de l’homme : quelle humanité voulons-nous ? Le but de l’Église est d’aider l’Europe à y discerner la question architectonique -celle dont dépend tout le reste- et à y répondre en ne faisant aucun compromis sur les principes fondamentaux de la loi naturelle et de l’anthropologie humaine qui sont tenus aujourd’hui pour négligeables ou pire, pour révolus.
Les évêques européens, réunis en colloque pour le 50e anniversaire du Traité de Rome en 2007, avaient précisé dans un message les points essentiels de la construction européenne :
La patience : « Nous considérons de notre devoir de poursuivre la construction européenne dans le temps, ayant à l’esprit qu’il s’agit d’une entreprise séculaire. Il a fallu plus de cent ans à nos ancêtres pour construire une cathédrale pour quelques-uns ; en cinquante ans, nous avons bâti une nouvelle  cathédrale pour tous les Européens… »
Le dialogue : « C’est en dialoguant sur et pour le bien commun des citoyens que nous contribuerons à une forte cohésion sociale, qui est aujourd’hui si importante et nécessaire à l’Europe… »
Le respect de la dignité humaine : « Nous demandons que l’UE soit guidée par les valeurs et les principes qui ont inspiré l’unification européenne depuis ses débuts. Il s’agit de la dignité humaine, l’égalité entre homme et femme, la Paix et la Liberté, la réconciliation et le respect mutuel, la solidarité et la subsidiarité, l’État de Droit, la Justice et la recherche du bien commun …»
Le respect des droits et devoirs qui en découlent : « Nous souhaitons que la solution institutionnelle qui sera atteinte sauvegarde la dignité humaine et les valeurs qui en dérivent, comme la liberté religieuse dans toutes ses dimensions, les droits institutionnels des Églises et des communautés religieuses, et qu’elle reconnaisse explicitement l’héritage chrétien de notre continent. 
Enfin, l’engagement : « Nous, Chrétiens, nos communautés, nos associations et mouvements contribuerons par notre engagement à soutenir les initiatives qui respectent authentiquement la nature humaine créée à l’image et dans la ressemblance de Dieu, telle que révélées en la personne de Jésus-Christ et qui, dans cette optique, œuvrent de manière authentique en faveur de la réconciliation, de la Paix, de la Liberté, de la solidarité, de la subsidiarité, de la Justice. »

Un appel renouvelé en 2014
La Commission des épiscopats de la Communauté européenne (COMECE)  a publié (20/03/2014) une déclaration en vue des élections européennes 2014 dans laquelle les évêques réaffirment leur soutien au projet européen « inspiré par une vision noble de l’homme » et encouragent tous les citoyens de l’UE à engager un dialogue constructif avec leurs députés européens. Ils soulignent également les sujets qui devraient représenter une préoccupation majeure non seulement pour les chrétiens mais aussi pour tous les hommes et femmes de bonne volonté soucieux de l’héritage qu’ils veulent léguer à leurs enfants.
 

Respect des droits humains fondamentaux
« Le respect de la dignité humaine » est « la base de toute politique sociale et économique », soulignent à nouveau les évêques. Il commence par le droit à la vie : « La vie humaine doit être protégée de la conception à la mort naturelle. La famille, qui est la composante de base de la société, doit bénéficier de la même protection », rappellent les évêques.
 Déclinant ces droits à propos des migrants, de l’écologie, de la liberté religieuse, du repos dominical, de la solidarité entre les générations, les évêques européens rappellent que «  l’Union européenne est à un tournant ». La solidarité entre les états membres est mise à rude épreuve par la crise économique qui a  « entrainé dans son sillage une vague de pauvreté (…) et a brisé les espoirs de beaucoup de jeunes ».

Les évêques ajoutent à leurs précédentes déclarations une note spécifique liée à la crise économique, appelant les futurs députés à prendre conscience de ses « dommages collatéraux » dont souffrent particulièrement les plus vulnérables. Et à tous, les évêques adressent un appel à réviser nos modes de vie, thème récurrent du pape François : « Nous devons apprendre à vivre avec moins et, par là même, veiller à ce que les personnes qui vivent dans la vraie pauvreté obtiennent une meilleure part. »

Les piliers du fonctionnement de l’Union européenne : subsidiarité,  solidarité,
S’agissant des domaines spécifiques des politiques de l’UE, les évêques rappellent que les « piliers » de l’UE sont également des principes de la doctrine sociale de l’Eglise. 
D’abord la  subsidiarité :  « … veiller à ce que les démarches de plus en plus nombreuses visant à l’unité au sein de l’UE ne sacrifient pas le principe de subsidiarité, qui est le pilier de cette famille d’Etats nations unique au monde que représente l’UE ; ni ne compromettent les traditions bien établies qui prévalent dans tant d’Etats membres. » Avis aux bureaucrates pondeurs de ” directives ” qui ne veulent pas admettre que les Estoniens n’ont pas exactement les mêmes aspirations, ni les mêmes besoins que les Grecs…et qu’on ne fera pas leur bonheur sans eux, encore moins contre eux.
Ensuite la solidarité :  « Ce principe devrait guider les politiques menées à tous les niveaux de l’UE, entre nations, régions et groupes de population. Il nous faut construire un monde nouveau, qui soit centré sur la solidarité. » Et non sur l’égoïsme suicidaire du ” chacun pour soi ” qui nous a valu deux guerres mondiales et aujourd’hui, une guerre économique qui ne dit pas son nom et, adossée à celle-ci, une guerre libertaire contre la nature humaine, celle-là même que le pape Benoît XVI a nommé « l’apostasie de l’Europe ».
Ils terminent par un nouveau plaidoyer en faveur du projet européen : «  Nous, les évêques catholiques, plaidons pour que le projet européen ne soit pas mis en danger ni abandonné sous la pression des contraintes actuelles. Il est impératif que nous tous – hommes et femmes politiques, candidats, parties prenantes – nous contribuions à forger de façon constructive le futur de l’Europe. Nous avons trop à perdre si le projet européen venait à se disloquer. »

Des engagements bien concrets
 Les appels de l’Eglise et des défenseurs des droits humains fondamentaux  ne sont pas restés lettre morte. La Manif pour tous a préparé pour les candidats aux européennes un questionnaire semblable à la charte qui avait été soumise aux candidats aux élections municipales (avec succès : 2300 l’avaient signée). Ils sont invités à s’engager à défendre la cellule familiale en rejoignant l’intergroupe sur la famille que la MPT veut créer au Parlement européen où travaille par ailleurs efficacement, sur le plan du respect de la vie, l’ “Initiative Citoyenne Européenne ” (ICE) One of us  qui a adressé aux candidats aux élections européenne un questionnaire sur le respect de la vie et de la dignité humaine. Les Associations Familiales Catholiques (AFC) contactent et rencontrent elles aussi les candidats aux élections européennes pour leur proposer de s’engager pour la famille en signant le Manifeste « Vote For Family » préparé par la Fédération des Associations Familiales Catholiques en Europe (FAFCE).
Autant d’initiatives à rejoindre et à soutenir activement !
 

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