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Europe : anniversaire ou requiem ?

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Philippe Oswald - publié le 09/05/14
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Ce vendredi 9 mai est la “Journée de l’Europe”, instituée en mémoire de la fameuse déclaration Schuman du 9 mai 1950, texte fondateur de la construction européenne. 64 ans après, pourquoi celle-ci semble-t-elle enlisée ?

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9/05/2014

Prononcée le 9 mai 1950 par Robert Schuman, ministre des Affaires étrangères français, dans le Salon de l’Horloge du Quai d’Orsay, à Paris, cette déclaration, inspirée par Jean Monnet, premier commissaire au Plan, est considérée comme le texte fondateur de la construction européenne. Elle propose la création d’une organisation européenne chargée de mettre en commun les productions françaises et allemandes de charbon et d’acier, résume la Fondation Robert Schuman.

La déclaration est précédée d’un paragraphe liminaire dont voici les premières phrases :
«Il n’est plus question de vaines paroles, mais d’un acte, d’un acte hardi, d’un acte constructif. La France a agi et les conséquences de son action peuvent être immenses.
Nous espérons qu’elles le seront.
Elle a agi essentiellement pour la paix. Pour que la paix puisse vraiment courir sa chance, il faut, d’abord, qu’il y ait une Europe. Cinq ans, presque jour pour jour, après la capitulation sans conditions de l’Allemagne, la France accomplit le premier acte décisif de la construction européenne et y associe l’Allemagne. (…) »

La déclaration proprement dite commence ainsi :
« La paix mondiale ne saurait être sauvegardée sans des efforts créateurs à la mesure des dangers qui la menacent.
La contribution qu’une Europe organisée et vivante peut apporter à la civilisation est indispensable au maintien des relations pacifiques. En se faisant depuis plus de vingt ans le champion d’une Europe unie, la France a toujours eu pour objet essentiel de servir la paix. L’Europe n’a pas été faite, nous avons eu la guerre.
L’Europe ne se fera pas d’un coup, ni dans une construction d’ensemble : elle se fera par des réalisations concrètes, créant d’abord une solidarité de fait. Le rassemblement des nations européennes exige que l’opposition séculaire de la France et de l’Allemagne soit éliminée : l’action entreprise doit toucher au premier chef la France et l’Allemagne. (…)»

Suit l’annonce d’un premier pas, « d’un point limité mais décisif » : «… placer l’ensemble de la production franco-allemande du charbon et d’acier sous une Haute Autorité commune, dans une organisation ouverte à la participation des autres pays d’Europe. Le Gouvernement français propose de placer l’ensemble de la production franco-allemande du charbon et d’acier sous une Haute Autorité commune, dans une organisation ouverte à la participation des autres pays d’Europe…. »
Ce texte aboutira à la signature, le 18 avril 1951 du traité de Paris, qui fonde la Communauté européenne du charbon et de l’acier entre six États européens.

En ce jour anniversaire et à deux semaines des élections européennes, en plus des traditionnelles festivités circonscrites aux lieux emblématiques de l’UE (portes ouvertes à Bruxelles, visite du Parlement de Strasbourg), « tous les moyens sont bons pour attirer l’attention des médias et des Français…et pour remobiliser un électorat bien peu concerné par les enjeux européens », constate le Huffington Post  : « pique-nique géant, caravane itinérante, happening politique, campagne en péniche…». Mais les principaux partis politiques, du Front de gauche au FN, en passant par le PS, les Verts et l’UMP, ne donnent évidemment pas les mêmes réponses à ces enjeux et aux questions qu’ils soulèvent. Si l’on y cherchait un point commun, on le trouverait peut-être dans le non-dit :  l’impasse sur le citoyen, sur l’homme, sa nature, sa destinée, et donc sur le véritable bien commun capable d’unir l’Europe quand la seule considération des intérêts économiques, en réalité, la divise.

Rappelant la déclaration du 9 mai 1950, le Père Cédric Burgun souligne cette phrase sur son 
blog :
« L’Europe ne se fera pas d’un coup ni dans une construction d’ensemble. Elle se fera par des réalisations concrètes créant d’abord des solidarités de fait ». Et l’éclaire par cette autre phrase de Robert Schuman qui corrige ce que la déclaration elle-même a de trop exclusivement économique (sans doute sous l’influence de Jean Monnet) : « Il n’y a pour nous d’autre chance de salut que le retour aux principes de solidarité entre les individus et entre les Nations, à la pratique de la fraternité qui doit nous unir dans la coopération et dans le sacrifice. »

Malheureusement, l’Europe en rompant avec ses racines chrétiennes, se détourne par le fait même de la « pratique de la fraternité » et devient étrangère à la notion de « sacrifice ». Le Père Burgun rappelle à ce propos une intervention remarquée du pape Jean Paul II, devant le Parlement Européen le 11 octobre 1988 : « … saint Jean Paul II a évoqué trois domaines où la réconciliation européenne devait encore faire ses preuves : « d’abord réconcilier l’homme avec la création ; ensuite, réconcilier l’homme avec son semblable,  en s’acceptant les uns les autres entre Européens de diverses traditions culturelles ou familles de pensée, en étant accueillant à l’étranger et au réfugié ; et enfin, réconcilier l’homme avec lui-même. »
Et Cédric Burgun de commenter : « On voit assez nettement les implications de ces trois domaines. De manière complètement prophétique, Jean Paul II prévoyait que la création serait, tôt ou tard, le lieu de futures divisions. On le voit très clairement avec les questions énergétiques : saurons-nous partager et nous unir davantage quand demain nos pays manqueront de telle ou telle ressource ou les nations tireront-elles à nouveau la couverture vers elles ? (…)
L’homme est-il vraiment réconcilié avec son semblable, quand l’on voit que nos sociétés s’enfoncent toujours plus dans l’individualisme qui n’est en fait qu’un  « je-m’en-foutisme » grandissant ? (…)

Et enfin, l’homme est-il réconcilié avec lui-même, c’est-à-dire avec son humanité et sa vocation, avec son propre corps, avec son âme dont la soif de spiritualité est aussi importante que l’air et l’eau pour nourrir son corps, quand on sait que nos pays occidentaux sont les plus grands consommateurs d’antidépresseurs, par exemple ? Quand on sait que l’on joue aux apprentis sorciers avec la moindre cellule de nos corps ? Quand on sait que l’on veut briser jusqu’à la différenciation sexuelle au sein de l’humanité ? »
Et de conclure : « La paix et la réconciliation impliquent avant tout d’apprendre à vivre non plus pour soi, mais avec les uns et les autres, dans le respect de la diversité de nos langues, de nos cultures et de nos religions : la fraternité « chrétienne » dont parlait Schuman est bien à l’ordre du jour. Notre modèle européen doit être caractérisé par ce « vivre ensemble » communautaire (et d’ailleurs, nous avons beaucoup perdu, dans le langage en passant de la « communauté européenne » à « l’Union européenne ») : là déjà, nous pourrons faire fructifier l’héritage chrétien des valeurs qui ont fait et qui font, aujourd’hui encore, l’Europe. Il faudrait détailler chacun de ces points : ensemble, ils montrent bien la nécessité qu’a l’Europe de recouvrer son âme. »

Oui, dira-t-on, mais comment, par quels chemins ? Lire à ce propos, la réflexion approfondie que vient de publier le mouvement Communion et Libération (cf. Aleteia).

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