Dieu est dans tous les dictionnaires mais cette fois, Il a son « Petit dictionnaire » auquel nous introduit son auteur, Jacques Gauthier.
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11/04/2014
Jacques Gauthier vient de publier un Petit dictionnaire de Dieu, (éditions Novalis, diffusé en France et l’Europe francophone par les éditions du Cerf). En voici l’introduction :
Dans La poétique de la rêverie, Gaston Bachelard confesse que « c’est toujours un dur métier que celui d’écrire un livre. On est toujours tenté de se borner à le rêver. » Il me semble que cela est encore plus vrai pour l’écriture d’un dictionnaire. Ce voyage alphabétique peut devenir une caverne d’Ali Baba aux entrées imprévisibles, un bric-à-brac de mots aimés, une écriture en forme de collage, à l’image de notre monde morcelé. Alors, imaginez lorsque le sujet n’est nul autre que Dieu, cela suppose tout un assemblage. Si Dieu est incompréhensible de nature, les mots et les idées ne manquent pas pour parler de lui. Mais gare aux idoles !
Dieu est lumière
De la racine indo-européenne dei qui signifie « briller », le mot « Dieu » est lié aux notions de jour (dies), de lumière, de la foudre qui renvoie au ciel. Cela donne le nom grec Zeus (génitif de Dios), puis theos, du verbe theaomai qui signifie « je suis bouche bée ». Dieu attire, éclaire, étonne. Il figure depuis longtemps dans les dictionnaires. En voici un exemple, tiré du Dictionnaire universel d’Antoine Furetière de 1694 : « Il ne peut avoir de vraye definition, à cause que c’est un Être infini & incompréhensible. Les hommes le considèrent comme la première Cause, le premier Être qui est de tout temps, qui a tout créé, & qui subsiste de lui-même. »
Difficile de passer inaperçu quand on est au commencement de tout. L’ombre de Dieu se faufile incognito entre les pages des dictionnaires, au fil des siècles et des usages, mais c’est peine perdue, nul ne peut vraiment le saisir. Dieu n’est pas une invention, disait Louis Massignon, il est une découverte. Voltaire, plus sarcastique, affirmait que si Dieu n’existait pas il faudrait l’inventer. Pour la Grande encyclopédie soviétique de 1950, Dieu est une « créature mythique et fictive à la base de toute considération religieuse ». Pour d’autres, c’est un terme vague, vide, qui donne l’illusion d’une plénitude, d’une direction. « Le mot dieu est un petit creux dans lequel je mets tout », écrit la chorégraphe Marie Chouinard dans son recueil Chantier des extases.
Star de Google
Du tam-tam à l’ordinateur, des tablettes d’argile aux écrans tactiles, la notion de Dieu vient de loin et on entend toujours son écho, tant elle résiste à l’usure. C’est l’un des mots les plus souvent tapés sur le moteur de recherche Google et il compte des millions d’amis dans les réseaux sociaux et les blogues. On gazouille à son sujet en moins de 140 caractères ; c’est là tout un défi quand on contient l’infini.
Nietzsche disait qu’une chose expliquée cesse de nous intéresser. Dieu a donc un bel avenir devant lui ! Personne n’a encore réussi à démonter sa mécanique ni à vider sa poétique. Le poète américain Wallace Stevens en convenait dans l’une de ses maximes : « La plus grande idée poétique du monde est et a toujours été l’idée de Dieu. »
Si aucun mot ne peut vraiment définir Dieu, est-il raisonnable de lui consacrer un dictionnaire ? Non. Cela exige une bonne dose d’humilité et d’inconscience, tant ce projet donne le vertige. Mais le défi vaut la peine d’être relevé, avec l’aide de Dieu, bien sûr. Si les champignons, les fromages, les villes, les vins, les religions, les destinations touristiques, les citations, les noms propres, les symboles, les films, et quoi d’autre encore, ont tous leurs dictionnaires, Dieu peut bien avoir le sien… c’est-à-dire le mien, qui sera donc très personnel.
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