Après une campagne de travaux de 6 ans et de 4,8 millions de dollars, la grande église de Sanjiang est menacée de destruction : elle a déplu au secrétaire du parti communiste de la province.
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9/4/2014
Sanjiang, Chine. Ils sont plusieurs milliers de chrétiens à se relayer sur le parvis de leur grande église toute neuve. Face à eux, les bulldozers et leur décret de démolition. Une femme de 74 ans, Yang Zhumei, interpelle les chefs de chantier « Camarades, n’abattez pas notre croix. Je vous offre ma tête à la place ! ». Sa voisine, Li Jingliu qui a perdu un bras dans un accident industriel fait preuve de la même détermination : "Je garderai l’église jusqu’au bout, sans craindre les épreuves ni la mort", affirme-t-elle.
Ils se relaient sur place 24 heures sur 24, persuadés qu’au moindre signe de faiblesse les équipes de démolition entreront en action. Les paroissiens sont organisés avec une précision quasi militaire : une cuisine mobile a été installée, préparant du riz, du porc et des légumes frits aux manifestants, des bouteilles d’eau sont distribuées… À l’heure ou nous écrivons ces lignes, le statu quo demeure, et le conflit s’enlise.
Pourtant, ce lieu de culte a été édifié dans les règles de l’administration chinoise, et il appartient à l’Eglise protestante officielle de Chine, plus précisément à l’Eglise patriotique « des trois autonomies » (1), chapeauté par les autorités chinoises. Manque de précision dans les plans ? Revirement du parti ou simple mouvement d’humeur ? Xia Baolong, le secrétaire régional du Parti a été choqué lors d’une tournée en voyant cet édifice de plus de 1000m². Il accuse les chrétiens d’avoir outrepassés leurs droits, et d’avoir construit une croix plus haute que ce qui était prévu. Il s’est empressé de demander à la ville de faire détruire l’église pour « non respect des normes de sécurité ».
Sans doute a-t-il sous-estimé la réaction des paroissiens, qui ne sont ni des clandestins ni des opposants historiques. Leur manifestation est d’ailleurs observé à la loupe par les autorités chinoises, très méfiantes à l’égard de tout ce qui touche aux religions. La ville dans laquelle se déroule ces heurts a une forte valeur symbolique pour les chrétiens de Chine : on appelle Sanjiang la « Jérusalem de l’Est », avec une minorité chrétienne essentiellement protestante, qui compte plus d’un million de fidèles.
(1) Autonomie vis-à-vis des financements étrangers, du pouvoir étranger et de l’annonce de l’Evangile. Les communautés qui appartiennent à ce « mouvement » n’ont pas de contact officiel avec les institutions ecclésiastiques étrangères.