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Référendum en Crimée: la fin d’une époque ?

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Paul Monin - The New York Times - Realpolitik.tv - publié le 17/03/14
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Rejeté par l’Union Européenne et les États-Unis, ce référendum porte en lui les limites de la mondialisation.

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17/03/2014

Avant même que les résultats du référendum en Crimée ne soient promulgués dimanche, Herman Von Rompuy, président du Conseil Européen, et José Emmanuel Barosso, président de la Commission européenne, déclaraient que celui-ci était « illégal et ne sera pas reconnu » et qu’il était « contraire à la Constitution Ukrainienne et aux règles internationales». Mais la situation n’est pas aussi simple que les déclarations de ces dirigeants le laissent entendre.

Tout d’abord, il faut savoir que la Crimée n’est pas une simple région de l’Ukraine. La Crimée fut donnée en « cadeau » à l’Ukraine par Nikita Khroutchev (lui-même d’origine ukrainienne) en 1954. Après la dissolution de l’URSS, la Crimée est devenue une République Autonome intégrée dans l’Ukraine, avec sa propre Constitution.
 
Or, pour l’économiste Jacques Sapir, «qualifier le référendum d’illégal du point de vue de la loi ukrainienne est une profonde sottise et montre de la part des dirigeants qui utilisent cet argument une incompréhension totale des principes du Droit. »
 
En effet, en faisant tomber le gouvernement de Ianoukovitch, les révolutionnaires ont entraîné « une interruption de l’ordre constitutionnel en Ukraine », notamment dûe la dissolution de la Cour Constitutionnelle par le nouveau gouvernement mis en place, dont le président par intérim Olexandre Tourtchinov n’avait d’ailleurs pas été reconnu par les Autorités de la République Autonome de Crimée.
 
Suite à la Révolution – ou au coup d’état, selon le point de vue – des Euromaidan, « les autorités de la République Autonome de Crimée ont considéré que cela créait une nouvelle situation, dans laquelle les droits de la Crimée n’étaient plus garantis, et ont décidé de la tenue du référendum du 16 mars. Le référendum est donc une réaction à la rupture de l’ordre constitutionnel à Kiev. Il n’est ni légal ni illégal dans la mesure où cet ordre constitutionnel n’existe plus. »
 
Mais est-il contraire aux règles internationales ? Non, selon Jacques Sapir : « Si les pays qui aujourd’hui s’opposent au référendum avaient fait pression pour que le gouvernement de Kiev remette son pouvoir à un gouvernement de concorde  nationale, réunissant toutes les parties en présence, ils auraient eu quelques droits à faire valoir le principe de l’intangibilité. Mais, ayant choisi de reconnaître unilatéralement un gouvernement ne représentant qu’une partie de la population, ils ne peuvent plus user de cet argument sans contrevenir directement au second argument, celui sur le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. »

Dans cet imbroglio diplomatique international, où intérêts économiques et enjeux géopolitiques sont inextricablement entremêlés, il n’est pas facile d’y voir clair. Pourtant, il semble que certains politiciens ont une vision assez simple –pour ne pas dire simpliste – de la situation : d’un côté le bien, le super-héros Américain, assisté de son fidèle acolyte l’Union européenne, et de l’autre, le méchant et terrible Poutine.
 
C’est en tout cas la teneur des propos de John Mc Cain qui, dans une diatribe publiée sur le site du New York Times vendredi dernier, a fustigé Obama pour s’être montré impuissant, considère « Mr Putin » comme l’ennemi n°1 et se demande tout simplement quand les pays du monde libre  vont enfin comprendre qu’il n’y a d'autre salut que dans la nation américaine, « terre de la Liberté et patrie des courageux ».
 
Selon John McCain, le régime de Vladimir Poutine « peut apparaître imposant, mais il est pourri à l’intérieur. Sa Russie n’est pas une grande puissance à l’égal de l’Amérique. C’est une station-service dirigée par un régime autocratique corrompu. Et les russes finiront par chasser Mr. Poutine de la même manière et pour les mêmes raisons que les ukrainiens ont chassé Viktor F.Ianoukovitch ». Pour le sénateur républicain de l’Arizona, il est clair que « chaque nation aspire aux valeurs politiques de l’Ouest ». On se croirait revenu aux temps de la Guerre Froide.

Référendum en Crimée: la mondialisation s'arrête ici.
Lorsque Vladimir Poutine déclarait en 2005 que « l'effondrement de l'Union soviétique a été la plus grande catastrophe géopolitique du siècle », il ne disait pas regretter l’URSS (comme beaucoup de média occidentaux le clamaient), mais expliquait que l’effondrement d’un des blocs, dans une organisation mondiale alors bipolaire, avait entraîné un chaos géopolitique certain. Et l'histoire semble lui avoir donné raison. 
 
En effet, depuis la fin de la guerre froide, nous vivons dans ce que certains historiens appellent le Nouvel Ordre Mondial – concept controversé qui désigne l’alignement idéologique et politique de la majorité des États et des organismes mondiaux sur un certain modèle, dont les États-Unis seraient le porte-étendard. Force est de constater que ce système ne fonctionne pas, comme nous le montrent les évènements en Ukraine.

Le professeur de géopolitique Aymeric Chaupade, qui a suivi le référendum en Crimée, considère qu’il « porte incontestablement le signe d’un nouveau monde : un monde multipolaire avec une vraie indépendance européenne, et non cette Union euro-atlantique qui détruit, année après année, nos identités et nos économies.  La boucle est bouclée. Le vieux monde né de Yalta en février 1945, de l’entente de deux mondialismes, atlantiste et communiste, prend fin… à Yalta en mars 2014, soit presque 70 après ! "

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