Les quelque 8 millions d’euros que rapporte le monument seraient peut-être bien la vraie clef de cette affaire…
Pour qu’Aleteia poursuive sa mission, faites un don déductible à 66% de votre impôt sur le revenu. Ainsi l’avenir d’Aleteia deviendra aussi la vôtre.
*don déductible de l’impôt sur le revenu
28/02/2014
La pétition en question, qui a recueilli plus de 75 000 signatures, demande d’« arrêter d’utiliser institutionnellement le seul terme de “cathédrale” pour désigner l’ensemble du monument » ; la « reconnaissance juridique de propriété publique »; « la gestion publique et transparente de la mosquée-cathédrale » ainsi que « l’élaboration d’un Code de bonnes pratiques ».
Cette pétition a été entendue par la Junte d’Andalousie, qui a commandé un rapport afin d'établir si elle pouvait réclamer la gestion de l’enceinte qui, depuis 2006, est immatriculée au nom de l’Eglise et deviendra officiellement la propriété de celle-ci en 2016, soit dix ans après son immatriculation.
L’argent des visites derrière la polémique
L’édifice religieux devrait rester catholique, quel que soit son propriétaire. Derrière cette controverse, on trouve en fait l’utilisation et la jouissance des bénéfices juteux que suppose l’argent des entrées. La visite de la mosquée-cathédrale, en effet, coûte 8 euros par personne ; soit, multiplié par le plus d’un million de visiteurs, plus de 8 millions d’euros exonérés d’impôts, puisque considérés comme des dons.
En fait, en 1991, cette gestion ordinaire de la mosquée-cathédrale a été signée moyennant un accord de collaboration entre la Junte et l’évêque de Cordoue. En vertu de cet accord, l’entité ecclésiale apparaissait comme la “titulaire” du monument et la Junte d’Andalousie comme administrateur et responsable des politiques culturelles d’Andalousie. Dans cet accord étaient réglementées toutes les interventions financées par des fonds publics ainsi que l’utilisation des entrées et la gratuité pour les personnes nées ou résidant à Cordoue. Pourquoi alors, en 2014, et en pleine crise, cette “propriété” est-elle remise en question? La clef de cette polémique serait-elle dans ces quelque 8 millions d’euros que rapporte le monument ?
Les différents points de vue sur la polémique
Pour la mairie, la polémique n’existe pas : « pour la mairie de Cordoue et le Conseil municipal, cela ne pose pas problème, n’est pas cause de tension », a expliqué José Antonio Nieto, qui souligne que « heureusement la mosquée-cathédrale est en parfait état, parfaitement entretenue et ouverte à tous les visiteurs », de sorte que « respectant » comme elle respecte « toute autre initiative » il note que, pour lui, le débat « n’est pas une priorité ».
Telle n’est pas l’opinion de la Junta de Andalucía qui, par la voix de son porte-parole, Miguel Ángel Vázquez, a déclaré qu’il estime que la voie de la “propriété publique” est "la bonne", tout en maintenant la gestion exercée jusqu’ici par l’Eglise, parce qu’elles sont « compatibles ».
De son côté, le chapitre de la cathédrale a tenu à préciser qu’il a “toujours entretenu collaboration et bonne entente avec les administrations publiques, et qu’il n’a été question à aucun moment de remettre en cause ni la propriété ni la gestion du temple ”.
« L’Eglise de Cordoue a rempli la mission qui lui avait été confiée dans trois domaines essentiels: le culte, la culture et la charité. Une tâche qu’elle développe depuis près de huit siècles, publiquement, pacifiquement, et sans interruption en qualité de propriétaire », explique-t-elle dans un communiqué
Le chapitre conclut en affirmant « qu’il maintiendra cet esprit de collaboration avec toutes les Administrations publiques comme il l’a toujours fait, de façon que tout tourne à l’avantage des intérêts de la ville et des Cordouans, lesquels bénéficient de l’entrée gratuite, au même titre que d’autres groupes ».
Pourquoi cette polémique,maintenant ?
Il est difficile, très difficile de comprendre pourquoi la Junte d’Andalousie suggère que l’Eglise aurait “volé” la propriété de la mosquée-cathédrale, alors que 8 années se sont écoulées depuis son immatriculation à toutes fins légales, et selon une réglementation et une procédure utilisées pour des constructions de ce type depuis 1863.
Cette année-là la législation espagnole propose une procédure d’immatriculation, qui permet d’accélérer le processus bureaucratique, qui est très lent, et concerne les biens de l’Eglise sur lesquels il n’existerait pas de titres de propriété écrits. Une procédure toujours en vigueur pour de nombreuses églises et temples dans la législation espagnole.
Après la prise de Cordoue par Ferdinand III le Saint, le roi restitua l’édifice à l’Eglise, la mosquée ayant été édifiée sur une ancienne basilique wisigothique du IVe siècle. Une cérémonie qui légitime le fait que l’édifice soit propriété de l’Eglise et que celle-ci ait décidé de demander son immatriculation en 2004, afin de défendre sur un pied d’égalité d’autres églises.
Jamais jusqu'à présent, depuis près de 800 ans que la mosquée a été restituée à l’Eglise, la Junta de Andalucía ni aucun gouvernement n’avait porté atteinte à la liberté religieuse et aux accords de l’Espagne avec le Saint-Siège. Il s’agit d’une polémique pour une question de propriété-gestion dans laquelle le seul intérêt serait l’argent.
Article de l'édition espagnole d'Aleteia traduit par Elisabeth de Lavigne